Sécurité sociale, l’indispensable solidarité

Publié le 10 octobre 2025

En ce mois d’octobre 2025, nous fêtons les 80 ans de la Sécurité sociale, née dans un pays ruiné par la guerre, et dont les effets ont été remarquables : sur le plan démographique et sur le plan sanitaire, comme en matière de réduction de la pauvreté de nos aîné·es, qui constituaient la grande majorité des pauvres en 1945 – après la faillite des systèmes de prévoyance individuelle dans les années 1930.

Les effets de sa riche histoire continuent à se faire sentir aujourd’hui. L’extension des assurances sociales allemandes, bismarckiennes, après la récupération de l’Alsace-Lorraine en 1918, tout comme le projet keynésien qui était, en 1942, au coeur du rapport de la commission Beveridge (alors que le Conseil national de la Résistance se trouvait à Londres pendant l’élaboration de son programme) ont pesé sur le « modèle français ». Depuis sa naissance, la Sécurité sociale a été soumise à différentes volontés politiques, entre ceux qui ont oeuvré à son étatisation (tel le plan Juppé de 1995) et ceux qui chaque jour militent pour sa marchandisation – faisant miroiter aux populations les bénéfices des solutions individuelles.

Une volonté de financiarisation de la protection sociale s’observe en lien avec la domination du capitalisme financier. Souvent réduite au « trou de la Sécu » – creusé avec intérêt par ses plus ardents opposants à travers les choix opérés, tant sur les dépenses que sur les recettes –, il serait pourtant erroné de ramener cette oeuvre collective à ses coûts et de croire, en confondant dépense collective et dépense socialisée, que les solutions individuelles seraient moins coûteuses. Il suffit de regarder du côté des États-Unis, qui consacrent plus de 17 % de leur PIB aux dépenses de santé (un record au sein des pays de l’OCDE), alors que le taux français est légèrement supérieur à 11 %, avec un système mondialement remarqué, sans coût de sélection des contrats, sans marketing et avec des frais de gestion particulièrement réduits.

Mais il faut aussi constater que la société a changé depuis 1945 et que de nouveaux besoins de protection sociale sont apparus, notamment en lien avec le fonctionnement du marché du travail. La protection sociale peine encore à prendre décemment en charge le chômage et il manque cruellement une branche sécurité sociale professionnelle ou sécurité d’emploi et de formation. Comme une branche sécurité sociale alimentaire.

Car, dans son évolution, des populations entières ont été soit oubliées, soit très mal couvertes, à commencer par les femmes. Le renoncement aux soins prend des proportions indécentes. La protection sociale laisse, par millions, des individus dans la pauvreté. Quant aux retraites, elles seraient intenables, nous dit-on, au regard de la démographie, alors que des solutions collectives existent dans une société qui ne souhaite pas voir ses aîné·es finir leur vie dans la pauvreté.

Ce dossier pointera quelques-uns de ces besoins : pour les femmes, pour les étudiant·es, pour les personnes dépendantes, pour les retraité·es. La FSU milite pour un remboursement intégral des soins prescrits (« 100 % Sécu »), pour un retour à la démocratie sociale et pour l’universalité de la protection sociale. Elle continue de s’opposer à son étatisation. Nous défendons un financement par cotisations élargi, à l’instar des besoins à couvrir, au-delà des seuls revenus du travail. Car il est plus que temps de reconquérir et d’étendre la sécurité sociale à l’ensemble des besoins nouveaux et de couvrir de façon universelle la population.

Comme le montre ce dossier, c’est une question de choix.

Dossier coordonné par Michel MARIC et Anne ROGER

SOMMAIRE :

  • La sécurité du lendemain, une part du contrat social, par Michel MARIC, p.10
  • La Sécurité sociale entre marchandisation et étatisation, par Philippe BATIFOULIER, p.12
  • Financement de la Sécurité sociale : revenir à l’essentiel, par Nathalie COUTINET, p.13
  • Pour une sécurité sociale féministe, par Anne ROGER, p.14
  • La sécurité sociale étudiante, quel bilan, quelles perspectives ? par l'Union Étudiante, p.15
  • Pour une sécurité sociale inclusive, par Laurence RASSENEUR, p.16
  • Le financement des retraites : un enjeu purement politique, par Hervé LELOUREC, p.17
  • « Il n’est pas d’égalité sans solidarité », entretien avec Colette BEC, p.18

 

 

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