Droits d’inscription : l’étau se resserre

Publié le 29 octobre 2025

Le budget 2026 vient d’entrer en débat au Parlement, avec un projet de loi de finances (PLF) du gouvernement Lecornu très insuffisant. Pour le service public de l’enseignement supérieur et de la recherche, il annonce une sérieuse dégradation de l’emploi scientifique comme des conditions de travail et d’études, déjà bien attaqués en 2025. Le ministère, s’appuyant sur plusieurs rapports, encourage les écoles d’ingénieurs à augmenter massivement leurs droits d’inscription pour faire face au désengagement de l’État.

Ne nous y trompons pas, ces hausses ne sont qu’une première étape de la marchandisation de l’enseignement supérieur public, à la suite de celle pour les étudiant·es étranger·ères extracommunautaires en 2018. Avec la loi cyniquement nommée « Bienvenue en France », ils avaient vu leurs droits d’inscription en licence et en master multipliés par 16, tandis que déjà plusieurs grandes écoles profitaient de l’arrêté ministériel pour augmenter les leurs de 600 euros à plusieurs milliers. Et voilà que dans le PLF 2026, pour plaire à l’extrême droite, le gouvernement propose de leur supprimer l’aide personnalisée au logement (APL)…

Contrairement au financement du service public par l’impôt, la hausse des droits d’inscription est une mesure de financement à la fois inégalitaire entre établissements et sexiste, ségrégationniste et aliénante à l’encontre des étudiantes et des étudiants. David Flacher dresse un état des lieux des droits d’inscription en France ainsi que du contexte économico-politique qui pousse à leur accroissement. Joël Laillier décrit la situation au Royaume-Uni, pays où le gouvernement a permis une augmentation massive des droits d’inscription dans ses universités il y a quinze ans, notamment vis-à-vis des étudiant·es étranger·ères, afin de réduire le financement de l’État. Les universités britanniques doivent maintenant licencier massivement leur personnel à la suite de la baisse des échanges internationaux.

En France, la décision ubuesque du Conseil d’État, en 2019, de considérer que 2 770 euros de droits d’inscription en licence et 3 770 euros en master sont des montants "modiques" qui ne s’opposent pas à l’obligation constitutionnelle de gratuité de l’accès à l’enseignement supérieur, et qui limite cette « gratuité » aux formations de licence et de master et pas aux diplômes d’établissement, laisse la voie libre aux grandes écoles délivrant les diplômes d’ingénieurs.

Ces hausses entraînent les étudiant·es dans l’endettement, les aliénant à long terme, avant même leur arrivée sur le marché du travail. Enfin, il est démontré que l’augmentation des droits dans une société capitaliste et patriarcale est éminemment sexiste et classiste et que, malheureusement, cela se confirme partout où elle se déploie, dans les formations publiques comme dans celles du privé.

Face à cette politique du gouvernement, du ministère et des directions d’établissements, ce n’est qu’en établissant un rapport de force avec le personnel et les étudiant·es que nous parviendrons à nous y opposer et à imposer une gratuité des droits d’inscription pour toutes et tous. Puisse ce dossier nous aider à le construire. L’enseignement supérieur n’est pas un coût mais un investissement pour l’ensemble de la société.

Dossier coordonné par Hervé CHRISTOFOL et Hugo HARARI-KERMADEC

SOMMAIRE :

Droits d’inscription dans le supérieur : jamais la pression n’aura été aussi forte ! David FLACHER, pp.10-11

Faillite de la marchandisation des études supérieures dans les universités britanniques, Joël LAILLIER, pp.12-13

Augmenter les droits dans les écoles d’ingénieurs, une décision plus idéologique qu’économique, Hervé CHRISTOFOL, pp.13-14

Contre la libéralisation de l’ESR et l’augmentation des droits d’inscription des formations d’ingénieurs, Collectif Ingé·es sans frais, p.14

Les mécanismes patriarcaux des droits d’inscription, Hugo HARARI-KERMADEC, p.15

Droits d’inscription « modiques » : le cynisme du Conseil d’État, Hugo HARARI-KERMADEC, p.16 

Marchandisation croissante des formations des établissements publics, Hervé CHRISTOFOL, p17