Université de Nantes | Philosophie générale des réformes dans l’enseignement supérieur et la recherche

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Publié le : 15/03/2018

Non, ce que vous allez lire n’expose pas les réformes souhaitables selon le Snesup. Nous souhaitons porter à votre connaissance une contribution de R. Gary-Bobo (professeur d’économie à l’ENSAE) adressée en novembre 2016 à l’équipe de campagne d’E. Macron. Parmi les destinataires, T. Coulhon actuel conseiller du président Macron pour l’ESR.

L’intérêt de ce texte est de proposer une philosophie générale des réformes à mettre en œuvre dans l’enseignement supérieur et la recherche, dont la réforme d’APB (accusée de tous les maux) peut être la première étape.

De ce texte de 8 pages, nous ne donnons ici que les titres et sous titres, avec quelques brefs résumés et commentaires, et en vous invitant à le lire intégralement (ici : https://www.wikileaks.org/macron-emails//fileid/50687/18178 )

 

Extraits de la contribution de Robert Gary-Bobo, professeur d’économie à l’ENSAE (16 nov. 2016).

« Réformes souhaitables de l’enseignement supérieur français et éléments d’une stratégie de changement » (titres, sous titres et extraits du texte de R. Gary-Bobo).

« Nous présenterons nos idées en deux parties.

1. Ce qu’il serait souhaitable de faire.

2. Eléments d’une stratégie de changement (et de communication).

« Il semble important de séparer les deux choses ; savoir où on va (cela peut être utile parfois) et comment on y va (par des chemins parfois un peu sinueux, pour faire avaler la pilule au malade récalcitrant). Donc la première partie de ce texte fera hurler les âmes sensibles car elle ne prend aucune précaution oratoire; il faut avoir la patience d’arriver jusqu’à la seconde partie pour avoir un peu de baume au cœur ».

1. Ce qui serait souhaitable

1A. Réforme du financement de l’université : développer le crédit aux étudiants, augmenter les droits d’inscription. Le nerf de la guerre.

Disette budgétaire.

Hausse des droits d’inscription : «  …/… Cela donne l’ordre de grandeur des droits vers lesquels on irait : entre 4000 et 8000 euros par an et par étudiant, avec un taux de subvention publique d’au moins 50% ».

Développement du crédit aux étudiants : «  …/… en même temps mettre en place un grand système de crédit aux étudiants … Il y a de nombreux arguments économiques et éthiques (mais oui !) qui peuvent être mis en avant pour justifier le recours au crédit, accompagné de hausses substantielles de droits …/… »

Impliquer les banques

Prêts à remboursement contingents au revenu

La pompe à finance

1B. Parachever l’autonomie : gouvernance ; fusions, carrières ; concurrence ; sélection à l’entrée.

« Le maître mot est ici de réaliser une véritable autonomie (plus ou moins sur le modèle des universités publiques américaines, comme l’Université de Californie) ».

Les séquelles de la loi Pécresse

Séparation des pouvoirs à la Montesquieu : [ Résumé : Un CA aux membres extérieurs rémunérés, un président manager professionnel, et un sénat académique composé des seuls professeurs ].

La tragédie des COMUE

Renoncer à l’interventionnisme et à la centralisation : vive le laissez-faire ! «  …/… D’ores et déjà, dans l’enseignement supérieur français, l’égalité, c’est seulement pour les élèves moyens et faibles… et il y a de l’égalité dans la pauvreté ».

Une tenure track à la française : «  …/… Il faut permettre aux établissements d’aller sur le marché des docteurs avec des offres de tenure track : services d’enseignement réduits, salaires en hausse et titularisation —ou non— après évaluation, au bout de 7 ans, pour des jeunes qui demain constitueront la nouvelle élite intellectuelle du pays.…/… ».

La liberté de sélection…et l’ « orientation » : «  Un complément indispensable des réformes proposées ci-dessus est la liberté pour tous les établissements d’enseignement supérieur de sélectionner leurs étudiants ».

Créer des genres d’IUT un peu partout

1C. Réforme de structure : faut-il mettre fin aux dualismes ? Grandes écoles-universités. Grands organismes (recherche) et université.

Dualité des grandes écoles et des universités

Dualité enseignement supérieur-recherche

2. Eléments d’une stratégie de changement et de communication

« A peu près tout ce qui est proposé ci-dessus est politiquement sensible. … Il y a peut-être tout de même des astuces qui permettent de faire passer ces réformes, … ».

2A. Crédit et droits d’inscription : faire les choses dans le bon ordre et avec gradualisme

Comment faire passer la pilule de la hausse des droits d’inscription ?

Commencer bien sûr par le crédit : ne pas mettre la charrue avant les bœufs : «  Il faut certainement commencer par assurer le développement du crédit aux étudiants. … L’objectif affiché est de développer l’autonomie des jeunes … Et en plus, on ne supprimera pas les bourses sur critères sociaux, bien évidemment (au contraire) ».

Y aller doucement mais commencer tout de suite avec les droits d’inscription :  «  …/… Les étudiants auront droit à un prêt de 1000 euros de la banque de leur choix …/… le paiement cash sera découragé par une petite majoration ».

Instaurer la sélection mine de rien : «  …/… Là encore : laisser faire. Les étudiants se précipiteront dans les formations sélectives et payantes qui correspondent à leurs niveaux et à leurs aspirations …/… Il faut bannir du vocabulaire les mots de concurrence et d’excellence, détestés par les syndicats d’enseignants et d’étudiants. Remplacer ces mots systématiquement par ouverture et diversité. … ».

2B. Réforme de la gouvernance : rien d’obligatoire. Permettre aux établissements d’opter pour un nouveau système

Le maître mot ici aussi est la liberté d’option

« Créer une nouvelle catégorie d’établissement public ? Libérer les énergies universitaires : …/… En adhérant au mouvement des universités autonomes, les professeurs accepteraient le principe de la sélection à l’entrée, de la tarification des études (droits d’inscription), de recrutements et titularisations suivant le principe d’une tenure track à la française (crucial, mais sans que ces dispositions concernent obligatoirement tous les recrutements d’enseignants), la séparation des pouvoirs entre sénat académique et CA ; une représentation forte des tutelles dans le CA ; la nature managériale de la présidence. A cela il faut ajouter bien sûr : les « responsabilités et compétences élargies », le droit de signer des contrats de travail de droit commun, la propriété des bâtiments et des terrains, l’autonomie budgétaire et peut être même un affranchissement plus grand encore de certaines règles du droit public classique, sans enfin exclure la signature de contrats avec les collectivités territoriales et le gouvernement.…/…

Le maître mot ici, c’est la libération des énergies des universitaires et des chercheurs …/… ».

2C. Réforme des grands organismes et des grandes écoles

Fin programmée et lente du chercheur à vie et du jacobinisme scientifique : « Il y a peu à redouter d’une réforme prudente des grands organismes. …/… Plus de chercheurs à vie, mais des contrats renouvelables d’enseignants-chercheurs avec le CNRS (décharge de service contre pages publiées, de type IUF) …/… ».

Grande écoles : de la circonspection ; laisser faire les bactéries : «  …/… Lorsqu’elles seront confrontées à une concurrence de plus en plus forte de l’étranger et des universités, désormais autorisées à sélectionner leurs étudiants, les écoles seront forcées d’évoluer. …/… Il y aura convergence lente avec l’université…/… ».

 

Alors ? Le dispositif Parcoursup et l’annonce de la réforme de la licence, sont-ils les premières pierres de l’entree de l’université dans le grand marché deregule de l’education ?