L’avenir ne passe pas par l’hybridation des enseignements - Communiqué de l’Intersyndicale CGT - FO - FSU - SUD-Éducation de l'Université d'Angers, 5 juillet 2021

Publié le : 05/07/2021

 

 Communiqué de l’Intersyndicale CGT – FO – FSU – SUD-Éducation de l'Université d'Angers,  5 juillet 2021

 

L’avenir de nos étudiant·e·s et de la culture scientifique ne passe pas par l’hybridation des enseignements mais par le recrutement de personnels titulaires et des nouveaux locaux

 

Le 17 mai 2021, un rapport d’enquête de l’AFNEUS sur le bien-être et les conditions de vie des étudiants en filières scientifiques a dressé « un constat accablant et très préoccupant sur leur santé mentale, physique ainsi que sur les conditions de travail et financières de ces étudiants. (…) la détresse, l’isolement, le décrochage sont bien réels et bien présents. Il est plus que temps d’agir. » En particulier, à rebours des affirmations péremptoires de la ministre en février 2021, les étudiant·e·s ne citent aucun avantage au suivi des cours à distance si ce n’est le fait d’être « protégés du virus ».

Bien loin des préoccupations sanitaires qui ont pu justifier l’utilisation des outils numériques lors de ces derniers mois, la tentation d’utiliser l’enseignement à distance comme un palliatif au manque de moyens récurrents dans notre université (manque de personnels titulaires, manque de locaux…) apparaît de plus en plus clairement, notamment dans l’interview publiée le 1er juillet par le blog EdTechActu et donnée, ès-qualités, par le vice-président numérique et patrimoine de l’UA. Intitulée « À l’Université d’Angers, l’avenir est dans l’hybridation des enseignements », elle est à bien des égards un dénigrement des enseignements en présence des étudiant·e·s, en particulier des cours magistraux supposés, sans preuve, n’apporter qu’une « plus-value pédagogique (…) de plus en plus faible ». À l’inverse elle vante, également sans preuve, les outils numériques tels que Teams alors même que la CNIL recommande de ne plus avoir recours aux outils qui ne garantissent pas la sécurité des données personnelles.[1] Les choix effectués par nos collègues de l’Université de Nantes montrent pourtant que les logiciels libres constituent aujourd’hui une alternative parfaitement viable, contrairement à ce qu’affirment les personnes qui défendent le statu quo à l’UA.[2] Enfin, cette interview marque en creux une défiance vis-à-vis des collègues qui ne seraient pas « innovateurs ».

L’Intersyndicale tient à rappeler les engagements de l’université quant à la qualité du service public de l’enseignement supérieur. Elle passe en particulier par la garantie de l’enseignement sur site pour toutes et tous, et le respect des maquettes de diplôme votées en CFVU. Tant sur le plan de la santé mentale des étudiants que sur le plan des conditions de travail des personnels, un retour en présence sur site est indispensable. L’incontestable dégradation des conditions de travail que subissent les personnels depuis plus d’un an ne saurait perdurer une année supplémentaire. L’Intersyndicale tient à rappeler la progression du taux de vaccination ainsi que les progrès scientifiques réalisés dans la compréhension et le traitement de l’épidémie de Covid 19. Elle tient également à rappeler les nombreuses recommandations que nos organisations syndicales ont pu faire, notamment en CHSCT ministériel (derniers avis votés lors de la séance du 21 mai 2021) pour garantir un retour sur site en en toute sécurité des usagers et usagères. Les universités doivent obtenir les moyens nécessaires pour équiper les locaux (capteurs de CO2, ventilation…) permettant un accueil à 100% tout en garantissant le respect de la sécurité sanitaire.

La connaissance scientifique, dans les sciences de la nature comme dans les sciences humaines, se construit dans l’échange et l’interaction sensible. Elle ne se réduit pas à la consultation d’informations codifiées. L’enseignement en présence n’est pas un luxe et ne doit pas le devenir. Il ne doit ni être réservé aux classes prépa, aux formations sélectives, ni à celles et ceux qui pourraient se le payer, comme dans certains établissements privés. Il ne s’agit pas de former seulement des technicien·ne·s mais aussi des scientifiques capables de recul et d’esprit critiques.

L’hybridation n’a rien à voir avec une utilisation raisonnée de techniques numériques choisies librement par l’enseignant·e dans le cadre de ses choix pédagogiques.

  • Sauf exception due au retour de la pandémie, un·e enseignant·e ne peut être contraint à dispenser un enseignement à distance ou hybride. L’Intersyndicale défendra les collègues qui subiraient des pressions en ce sens ;
  • Les outils numériques ne doivent pas être imposés, ni être utilisés pour remettre en cause les libertés pédagogiques. Ils ne doivent pas gommer les spécificités disciplinaires (sorties sur le terrain, TP, etc.) ;
  • L’introduction contrainte de l’hybridation dans les maquettes des formations est inacceptable. À cet égard, la mise en place du très problématique Thélème ne doit pas servir de cheval de Troie à cette introduction.[3]
  • Les universités et les établissements d’enseignement supérieur doivent respecter le code de la propriété intellectuelle et ne peuvent contraindre les enseignant·e·s à céder leurs droits d’auteur dans le cadre de leurs missions de formation ou de recherche, conformément à la charte en vigueur à l’UA.

L'intersyndicale demande à la présidence de l'université de s'assurer du retour aux conditions normales d'enseignement en présence sur site pour tous les cours en septembre et dans toutes les composantes.

Angers, le 5 juillet 2021

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[1] « La CNIL appelle à des évolutions dans l’utilisation des outils collaboratifs étatsuniens pour l’enseignement supérieur et la recherche » (CNIL, 27 mai 2021). Ce point a été soulevé par l’intersyndicale en Comité technique le 25 juin, sans qu’aucune réponse, sinon dilatoire, n’y ait été apportée par la présidence de l’Université.

[2] L'Université de Nantes déploie sa bureautique collaborative en ligne en interne (CIO, 20/04/2020)

[3] La mise en place de Thélème n’est pas une simple « réorganisation pédagogique » comme le prétend la présidence. Son impact sur les conditions de travail de tous les personnels doit être pris en compte, comme cela a également été soulevé par l’intersyndicale lors du CT du 25 juin (demande refusée).