Contribution FSU au Congrès des trois Conseils de Lille 1 du 5 mars 2010 Du plan « Campus » au « Grand emprunt »...

Publié le : 16/03/2010

Ce Vendredi 5 Mars 2010 se tiendra (NDLR : s'est tenu) un Congrès des trois Conseils de Lille 1 (CEVU-CS-CA). L'ordre du jour en est un point sur le plan « Campus » et le Grand Emprunt.

S'il est légitime que l'Etat finance l'Enseignement Supérieur et la Recherche et investisse plutôt dans l'avenir que dans les dividendes des actionnaires des banques, se fixer comme objectif de miser que sur une dizaine de campus à vocation nationale et internationale est discutable !

En 2008, nous avons assisté à ce tri avec à l'arrivée, 10 plan « campus de première catégorie », deux plans « campus » second lot de rattrapage « campus prometteurs» (Lille-Nancy) et un lot de consolation pour Valenciennes....

Les « pragmatiques » nous diront que cette logique de choix pose question mais que le succès du rattrapage pour Lille 1 (+ Lille 2 + Lille 3) a permis de construire un beau projet de développement légitime, eu égard aux sous-dotations récurrentes. Maintenant, cela supposait de faire un premier pas vers la restructuration des universités régionales avec un rapprochement entre les trois universités de Lille qui a fait l'objet d'un premier Congrès des trois Conseils le 12 juin 2009. Que deviennent alors les trois autres Universités régionales?

Et voici le « Grand Emprunt » qui se pointe,... Pourquoi pas se porter candidat ? D'autant plus que la somme promise pour le plan « Campus » ne suffit pas...

Cette fois, il s'agit de 5 à 10 campus d'excellence! Il faudra montrer une masse critique encore plus grande! Pas de problème, passons du rapprochement de trois universités à l'intégration des 6 universités régionales, mais aussi d' établissements privés membres du PRES comme la FUPL (La Catho) et quelques écoles de commerce ...

En cela, nous assistons à l'utilisation habile de la course au financement gérée par l'Etat comme un outil efficace pour obtenir des universités exsangues, la restructuration à toute vitesse l'Enseignement Supérieur !

Voici les mêmes universitaires qui hurlaient, pas plus tard que l'année dernière, leur attachement à l'indépendance, l'importance du respect de la démocratie dans les instances universitaires, et leur refus de la logique d'un management d'une université à l'image de celui d'une entreprise...bientôt convaincus du bien fondé des réformes !

L'argent justifie-t-il d'oublier le fond ?

Quelle université souhaitons-nous ?

Son périmètre doit-il intégrer des établissements privés ?

Doit-on et jusqu'où sacrifier la démocratie pour construire des ensembles de taille croissante ?

Où est l'avenir des personnels et des usagers dans ces projets de taille pharaonique ?

Toutes ces questions nous et vous intéressent !

C'est pour cela, que la FSU, sur Lille 1, a choisi de rédiger une contribution pour ce Congrès et de la diffuser au-delà des espaces feutrés et voluptueux des Congrès réservés aux élus et invités de marque (directeurs de Laboratoires et directeurs de composantes)!

 

 

Contribution FSU au Congrès des trois Conseils de Lille 1 du 5 mars 2010

Du plan « Campus » au « Grand emprunt »...

Le 5 Mars prochain, se tient un nouveau Congrès des Trois Conseils de Lille 1 avec un ordre du jour brassant une nouvelle fois projet financier et structuration des universités. Calqué sur celui du 12 juin 09, il est simplement incrémenté du niveau « Grand Emprunt » qui justifiera un changement de périmètre dans l'intégration de l'Enseignement Supérieur régional. Cette initiative est encore une fois parfaitement concertée au sein du PRES : la tenue récente d'un congrès à Lille 3, les interventions des présidences en CA à Lille 2 et à l'ULCO en témoignent.

Le célèbre argument de la masse critique en vue d'atteindre une visibilité internationale nous sera à nouveau resservi pour prétendre à une nouvelle course aux financements!

A plan « Campus », campus lillois!

Dans la note datée de Mai 09, intitulée Le plan campus, l'université de Lille et la coopération métropolitaine (1), on pouvait lire :
« Le dossier du Campus Grand Lille a été finalement retenu, en décembre 2008, avec celui de l'université de Nancy et il figure donc parmi les douze dossiers « labellisés ».
Il vise trois objectifs :

  • ? mettre l'excellence scientifique au service du territoire
  • ? construire un Campus international, avec des hauts standards de qualité de vie et de travail
  • ? réaliser l'université de Lille »

Ainsi, appel d'offre campus et rapprochement d'universités régionales (à ce niveau Lille 1, Lille 2 et Lille 3) étaient donc liés, ce dernier étant une condition d'éligibilité au premier.

Lors du Congrès du 12 Juin 2009, le Président de Lille 1, P. Rollet présente aux élus les modalités de rapprochement défendues par les trois présidences:

  • ? rejet de la fusion car trop lourde à mettre en oeuvre,
  • ? une première étape de confédération afin d'apprendre à se connaître avec transfert limité de compétences programmée pour 2010.
  • ? choix à terme (objectif 2013 avec le nouveau quadriennal), d'une fédération permettant aux anciennes universités de préserver un degré d'autonomie (NDLR: bien que rétrogradées au statut d'Unité de Recherche et de Formation (UFR)).

Ce projet mené tambour battant, à grand renfort de la publicité nécessaire pour consolider le consortium de financeurs du plan campus et rassurer le ministère, semblait reléguer au second plan plusieurs points qui nous semblent essentiels :

? le devenir des trois autres universités publiques de la Région qui participent pleinement à la démocratisation de l'accès à l'Enseignement Supérieur Public comme à l'irrigation du tissu économique régional face à la construction d'un pôle lillois de taille gigantesque captant alors les financements des projets nationaux et régionaux,
? l'impact du passage à un unique EPSCP lillois sur les personnels: restructuration des services du fait de la mutualisation, incertitudes sur le résultat d'une harmonisation de trois politiques différentes en terme de gestion des ressources humaines, ...),
? mais aussi l'éloignement de la sphère décisionnelle du terrain d'activité des personnels et usagers qui interroge aussi bien le fonctionnement démocratique d'un ensemble multisite de taille considérable, que le maintien du lien entre formation et recherche pour l'ensemble des disciplines,...

Et aujourd'hui ? A Grand Emprunt, Grande Université Régionale !

Après une mise en veille apparente du projet pendant 6 mois, début 2010, on assiste à un changement de cap! La logique proclamée devient celle d'un grand service d'Enseignement Supérieur Régional unifié sur le périmètre du PRES, dit « de projets et de coopération», prémonitoirement
dénommé Universite de Lille Nord de France!

Bien avant les débats au sein des Conseils, la presse régionale s'en était fait l'écho. Ainsi, le premier février 2010, dans le Voix du Nord, le Président de l'ULCO, R. Durand refuse l'idée d'une fusion des trois universités lilloises et milite pour une université régionale.

http://www.lavoixdunord.fr/Region/actualite/Secteur_Region/2010/02/01/article_une-universite-lille-internationale.shtml?xtor=RSS-2P

Mme la ministre V. Pécresse, dans la même Voix du Nord, à la question : « Le risque n'est-il pas de voir apparaître des universités à deux vitesses ? », répond : « Non, justement, l'objectif du PRES, c'est de mettre tout le monde dedans ! Que tous bénéficient de l'image très positive d'un pôle centré sur la métropole lilloise, avec des établissements périphériques qui garderaient une identité propre. »

http://www.lavoixdunord.fr/Region/actualite/Secteur_Region/2010/02/01/article_les-universites-nordistes-doivent-oser.shtm l ,

Or dans le PRES figurent un certain nombre d'établissements privés qui se voient par là-même, en position d'intégrer un nouveau projet public.

Mais le Grand Emprunt dans tout cela?

En grattant un peu, la perspective de recherche de fonds n'est jamais très loin...

A la question: « Lille est-elle bien placée dans cette course au grand emprunt ?" Valérie Pécresse dans l'interview citée plus haut, répondait : « L'idée serait d'avoir de 5 à 10 campus d'excellence à visibilité mondiale. Lille a beaucoup d'atouts à faire valoir. C'est bien de signer un PRES, mais il faut passer à l'étape d'après. ».

L'étape d'après ?

La lecture du document sur le Grand Emprunt diffusé aux élus des conseils (document émanant du PRES) nous éclaire sur l'étape nécessaire pour prétendre à faire partie des « Campus d'excellence ».
On y lit que
« Les lauréats seront des universités ou des regroupements d'universités et de grandes écoles qui se donneront une gouvernance modernisée et une gestion efficace, avec un engagement clair sur des objectifs et des résultats. ».
C'est complété de la préconisation suivante :
« Il s'agira de se rapprocher des organisations de gouvernance observées dans toutes les grandes universités de recherche du monde : exécutifs resserrés, ouverts, et équilibrés par des instances académiques collégiales délibératives. »

  • Dans regroupement, on voit ce qui nous attend... L'ouverture à l'ensemble des partenaires du PRES !
  • Une gouvernance « modernisée avec un exécutif resserré et ouvert » : nous voyons également ce dont il est question, centraliser les pouvoirs et augmenter la part des personnalités extérieures désignées dans les Conseils, réduire d'autant la proportion des représentants élus des personnels et usagers !

C'est exactement ce qui se voit dans les statuts des EPSCP « grands établissements » qui fleurissent... Par exemple, le conseil d'administration de l'ENSAM est largement ouvert aux personnalités extérieures: 21 sur les 43 que comporte le conseil. De plus, ses président et vice-président sont élus
parmi ces personnalités extérieures.
http://emailavie.com/dg/z-ensam-1.htm

Alors, oublions un peu la logique purement financière pour aborder des problèmes de fond !

La position de la FSU est que, bien sûr nous ne sommes pas opposés à un processus de rapprochement et de coopération entre universités, s'il permet de jouer davantage les synergies, et de limiter la concurrence stérile entre les différents pôles de l'université publique, puissamment exacerbée par
la loi LRU.
Nous craignons que le leurre d'hypothétiques et dérisoires revenus du capital accordé grâce au grand emprunt (2) ne fasse disparaître au sein d'un ensemble gigantesque, les missions et le sens d'établissements publics universitaires, et que ceci ne soit que l'occasion d'acter de nouveaux reculs sociaux.

Nous doutons de l'avenir d'un Enseignement Supérieur et de la Recherche dont la restructuration est avant tout commandée par des motivations financières...

En conséquence, quatre repères guideront notre position :

  • 1. Nous militerons pour une structure qui se limite au secteur public.
  • 2. Nous exigerons que ce projet ne se paye pas par une dégradation des conditions de vie des personnels et usagers,
  • 3. Nous pensons qu'une transformation si profonde du périmètre de nos universités doit avoir lieu après un vote de l'ensemble des personnels des universités publiques organisé le même jour et proposant une structure de pilotage claire.
  • 4. La gouvernance de cette structure ne doit pas être moins démocratique que l'existant. Sur ce dernier point, le fonctionnement du PRES, les conditions obscures du choix de son président, son fonctionnement opaque, l'absence de retour vers les élus doivent servir de contre-exemple. C'est ce qu'il ne faut pas faire.

 

   

(1) Note pour le Congrès des conseils de Lille 1 du 12 juin 2009 

(2) Le chiffre de 30 millions d'euros de revenus annuels au maximum pour la dotation régionale circule... A titre de comparaison, le chiffrage des besoins pour le plan « Campus » lillois était de presque 700 millions d'euros, un peu plus de 200 millions devraient finalement être accordés à ce titre entre les contributions de l'Etat et celles des collectivités territoriales, si tout va bien...