La Lettre aux retraité.e.s n° 125 - Novembre 2020

Publié le : 26/11/2020

 

 

Pendant la presque totalité de cette année 2020, nous avons vécu avec la pandémie Covid 19. Notre pays n’est pas le seul à avoir été en situation difficile pour y faire face. Sous prétexte d’économies, année après année, l’hôpital public et le système de santé français ont été privés délibérément des moyens financiers et humains suffisants. Ceci s’est traduit en particulier dans les EPHAD à la fois par un très grand nombre de morts de la COVID-19 et par les mesures d’isolement de leurs résidents. Les personnes les plus touchées (COVID, précarité, chômage, …) sont les personnes défavorisées et en ce reconfinement, les associations constatent une augmentation des situations de grande difficulté. Cependant, l’application de mesures barrières diversifiées (cf. article de Jacques Haiech) diminue la transmission du virus ; les soignants ont appris sur la maladie, ce qui permet une meilleure adaptation des soins, diminuant la mortalité tandis que l’espoir d’un vaccin ou d’un traitement se rapproche.

Dans la succession des annonces et des mesures décidées par les gouvernements E. Philippe et J. Castex, on perçoit des choix imposés face à cette situation. La priorité est donnée à l’économie du pays (aides aux entreprises sans toujours les contreparties nécessaires, chômage partiel) tout en poursuivant l’équipement en matériels médicaux ou l’indemnisation dans le secteur culturel. La communication joue plus sur la peur que sur la rationalité et l’esprit critique de la population, comme les déclarations de J. Castex du 12 novembre sur le renforcement des contrôles le confirment. Un doute légitime sur le timing ou le bien fondé des mesures en termes de santé publique s’exprime : les masques étaient inutiles quand les gouvernements successifs n’avaient pas prévu de stock, puis ils ne sont devenus un élément de protection essentiel que lorsqu’ils ont été disponibles à nouveau (commandes à la Chine, mobilisations industrielles et artisanales) ! Ou encore les étudiant.e.s des Universités  devaient avoir cours en distanciel mais pas celles et ceux des classes prépas ou BTS des lycées. La situation sanitaire, les actions des personnels et des usagers ont amené l’éducation nationale à mettre en place des parcours hybrides en lycée (mais pas de ½ classe en collège et primaire) parfois sans les moyens de les faire fonctionner et des tests antigéniques vont être proposés aux personnels enseignants.

La fatigue de ces longs mois de restrictions et la défiance vis-à-vis des gouvernements conduisent parfois à des dérapages complotistes ou plus simplement pour certains à un déni de la dangerosité de ce virus, considéré comme seulement un de plus. Avec des statistiques de mortalité, ils disent par exemple que nombre de victimes seraient décédées d’autres causes. C’est une façon effrayante de considérer que la vie d’un individu peut être écourtée sans problème tant que les statistiques sont globalement respectées. De plus, on sait que même quand la Covid-19 ne tue pas, elle laisse des séquelles parfois durables, même chez les plus jeunes.

« Et « en même temps », que font E. Macron / J. Castex / les parlementaires ? Ils profitent de la crise sanitaire et de notre difficulté à agir dans ce contexte :

- Passage en force de la Loi Programmation Recherche qui normalise et généralise la précarité des enseignants chercheurs, aggravée par les amendements (du Sénat) validés par la Commission Mixte Paritaire :

* Suppression de la qualification par le CNU des MCF pour l’accès au corps des Professeurs, et dérogation à titre expérimental jusqu’en 2024 pour l’accès au corps des  MCF votées avec la bénédiction de la ministre F. Vidal. (Ici, le lien vers la pétition à l'initiative de la CP CNU : http://chng.it/y97MP6Hc)

*  Mais aussi pénalisation de manifestations non autorisées dans l’enceinte des universités.

- … pour faire de la place dans le calendrier parlementaire pour maintenir une réforme des retraites,[1] ;

- Projet de Loi de financement de la Sécurité Sociale ne répondant pas aux besoins réels, en matière de lits et de personnels soignants, tout en instaurant un forfait pour passage aux urgences sans hospitalisation ! ;

- Discussion d’une proposition de loi punissant la diffusion d’images de policiers et instaurant l’usage de drones et de la reconnaissance faciale lors de manifestations.

Une mention particulière à J. M. Blanquer pour avoir dit que l’« islamo-gauchisme faisait des ravages à l’université », reprenant une formule de l’extrême droite. Cette attaque a suscité l’émoi dans la communauté universitaire et éducative, et de multiples réactions.

En dernier lieu, l’islamisme radical s’est encore déchaîné avec en France l’assassinat de notre collègue Samuel Paty, parce qu’il enseignait la liberté d’expression (https://www.snesup.fr/article/mensuel-ndeg-689-novembre-2020) et celui de pratiquants d’un culte (Nice).

Face à ces atrocités, nous, universitaires en retraite, faisons exister la solidarité, la fraternité et la liberté, valeurs essentielles fondatrices du vivre-ensemble et de la démocratie, avec la volonté de maintenir l’esprit critique et la discussion bienveillante 

 

Jean Amar, Jacques Haiech,
 Michelle Lauton, Hervé Lelourec
13 novembre 2020