Fiche pratique : Consultation du dossier administratif individuel des agents publics

Publié le : 26/10/2021

 

 Fiche pratique 

Consultation du dossier administratif individuel des agents publics

 

Le dossier du fonctionnaire et au-delà, de tous les agents publics, obéit à des obligations de neutralité et de transparence qui en font en principe un instrument de protection de l’agent, qui a le droit d’en avoir connaissance.

Ce que disent les textes législatifs et réglementaires

Le droit d'accès au dossier administratif des fonctionnaires est régi principalement par les articles 18 et 19 de la loi 83-634 portant statut général de la Fonction publique:

article 18 : « Le dossier du fonctionnaire doit comporter toutes les pièces intéressant la situation administrative de l'intéressé, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité.
Il ne peut être fait état dans le dossier d'un fonctionnaire, de même que dans tout document administratif, des opinions ou des activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques de l'intéressé.
Tout fonctionnaire a accès à son dossier individuel dans les conditions définies par la loi
[...]. »

article 19 : « Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes […] L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. »

 

Le droit d’accès au dossier administratif des agents contractuels de l’État est régi par le décret 86-83, article 1-1 et article 44 (en cas de procédure disciplinaire), avec des formulations analogues à celles ci-dessus.

Depuis 2011, la gestion électronique des dossiers des agents publics est possible, en vertu du décret n° 2011-675, précisé par l’arrêté du 21 décembre 2012 relatif à la composition du dossier individuel des agents publics géré sur support électronique. Ce passage à la gestion électronique des dossiers nécessite en particulier la consultation préalable du comité technique de niveau adéquat, en l’occurrence celui de l’établissement pour les établissements d’enseignement supérieur et de recherche, et la publication d’une décision régissant les modalités pratiques locales de gestion des dossiers et de leur consultation, qui doivent être conformes aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

Contenus obligatoires et éléments interdits, numérotation obligatoire, droit de rectification

Le dossier administratif réunit tous les documents relatifs à la situation administrative de l’agent-e, depuis son recrutement jusqu’à sa radiation des cadres, voire même plus tard. Il est détruit en intégralité au plus tard lorsque l’agent atteint 80 ans.

Le dossier comporte notamment les documents portant sur les informations suivantes : état civil, situation de famille, diplômes, carrière (arrêtés de nomination, d'avancement, de promotion interne, de changement de position statutaire (détachement, mise en congé parental, etc.)), évaluations professionnelles, formations suivies, absences (arrêtés de mise en congé de maternité, de paternité, de maladie, etc.). Les compte-rendu d’entretiens professionnels ou d’entretien avec des supérieurs hiérarchiques pour d’autres motifs peuvent y figurer. De même, les sanctions disciplinaires prises par l’administration y figurent. Mais la mention des sanctions disciplinaires amnistiées ou effacées est interdite. En revanche, les documents évoquant les faits à l'origine de la sanction ne sont pas retirés.

La liste des pièces que peut comporter le dossier n’est pas limitative. Mais le dossier ne doit comporter aucun document mentionnant les opinions ou activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques de l’agent-e. En application du secret médical, aucune information relative à sa santé ne doit non plus y figurer. Seules les suites administratives de son état de santé peuvent apparaître dans le dossier (arrêté de mise en congé de maladie, avis du comité médical, etc.).

L’agent-e a le droit de demander le retrait de certaines pièces comportant des éléments qui ne doivent pas figurer au dossier administratif, ou de faire porter des observations sur certains documents s’il-elle le souhaite.

La numérotation des pièces de manière continue est obligatoire, ainsi que la loi en dispose, mais aucune réglementation complémentaire n’est jamais venue en préciser les modalités : la façon de numéroter les pièces du dossier n’est donc pas normalisée… Il se peut donc que la numérotation soit effectuée par « sous-dossier » (thématique), mais dans chacun de ces dossiers, les pièces doivent être référencées par ordre chronologique. Les pièces retirées doivent être signalées pour expliquer l’interruption dans la numérotation. Lorsque le dossier est géré électroniquement en intégralité, l’arrêté du 21/12/2012 vient préciser la durée de conservation des différents éléments et donne des pistes pour une nomenclature à adopter pour la numérotation.

Aucun motif n’est requis pour consulter son dossier, qui est donc consultable à tout moment par l’intéressé-e. En cas de procédure disciplinaire, l’administration doit explicitement informer l’agent de la possibilité consulter son dossier.

Les traces de chaque consultation par l’intéressé-e doivent également figurer au dossier ensuite. Cela permet de voir ce qui a été consulté comme pièces à chaque consultation, ce qui nécessite donc l’établissement, sous une forme imposée par aucun texte officiel non plus, d’un « bordereau » de consultation, c’est à dire un document comportant la liste des pièces consultées (ou fournies électroniquement).

Modalités de consultation du dossier :

Si le dossier est géré électroniquement, il est possible d’en avoir communication par voie électronique, selon l’article 14 du décret 2011-675 : « L'agent obtient, à sa demande, une copie de tout ou partie des éléments de son dossier géré sur support électronique, dans les conditions prévues par l’article 391 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée
― par transmission des documents correspondants à son adresse électronique professionnelle nominative ou par remise d'un support numérique ;
― ou par remise d'une copie sur support papier conforme à l'original. »

Cette communication est effectuée gratuitement pour les pièces fournies sous format électronique, mais la facturation de frais de reproduction est possible si les copies sont demandées sous format papier ou sur CD-rom (2,75 € max par CD-rom, 0,18 € max par page A4 noir et blanc).

Si le dossier n’est pas géré électroniquement (ou pas en totalité), il est possible de le consulter sur place, ou de demander la transmission par courrier de la copie de tout ou partie du dossier. L’administration est alors en droit de facturer les photocopies.

Remarque : il est également possible d’exercer son droit d’accès au dossier médical auprès de la médecine de prévention (voir infra).

En pratique, comment faire pour avoir accès à son dossier ?

Il faut en faire la demande écrite (voir modèle en fin d’article), pour avoir trace de la date précise de réception de la demande, qui fait courir les délais de recours. Un courrier électronique constitue une trace écrite, mais il est prudent de doubler par une lettre avec accusé de réception, en particulier dans le cas d’une consultation opérée dans un contexte conflictuel. Sans réponse dans les deux mois suivant la date d’accusé de réception de la demande, il s’agit d’un refus implicite, contre lequel il est possible de faire appel à la commission d’accès aux documents administratifs (CADA) pour obliger l’administration à donner accès au dossier.

Si le dossier n’est pas géré électroniquement, l’administration peut alors inviter l’agent-e à effectuer la consultation sur place. Dans ce cas, l’accompagnement par une tierce personne est possible, mais pas la consultation par cette tierce personne seule.

L'accompagnant-e peut être un-e militant-e syndicale, ou non. Dans tous les cas, se munir d’une version papier des articles législatifs et réglementaires en la matière, pour pouvoir les exhiber en cas de besoin. Elle peut obtenir copie des pièces (toutes, sauf quelques exceptions, comme les extraits de casier judiciaire, ou seulement celles qui l'intéressent). L'administration peut en demander le paiement : le plus simple si de telles velléités se manifestent est de dire dans ce cas d'envoyer une facture à l’adresse de l’agent-e, qui sera réglée à réception. En général, cela règle le problème, car le service qui gère le dossier n’est pas le même que le service qui fait la facture, donc cela engendre un travail supplémentaire pour des sommes ridicules pour les agents des services concernés, qui préfèrent souvent s’en passer et laisser les photocopies ou impressions fournies dans les frais de fonctionnement du service…

En cas d’impossibilité de se déplacer, il faut simplement demander la transmission des copies des pièces figurant au dossier, avec bordereau alors établi par l’administration à contresigner et renvoyer par l’agent-e.

Ensuite, si parmi les pièces figurant au dossier, certaines ne sont pas conformes à la loi, alors la personne concernée peut en demander le retrait. Elle peut également produire a posteriori des observations sur certaines des pièces qui y figurent, et demander à ce que ces observations soient jointes à son dossier.

Que faire en cas d’absence de numérotation des pièces ?

Dans certains cas où l’autrice de ces lignes a accompagné des collègues pour la consultation de leur dossier administratif sur place, dans un contexte conflictuel, les pièces du dossier n'étaient pas numérotées. Cela pose problème, non seulement parce que la loi dit que le dossier doit être numéroté, mais parce que cela ouvre la possibilité à des responsables indélicat-es de retirer certaines pièces du dossier avant la consultation, de les remettre après et d'en faire état par la suite… Si l'affaire doit avoir d'autres développements, on n'est plus en mesure alors de prouver que certaines pièces dont fait état l'administration n'ont pas été  montrées lors de la consultation pour les contester. Si cette absence de numérotation est constatée à la consultation effectuée sur place de votre dossier ou celui d’un-e collègue que vous accompagnez, il faut donc être très exigeant-e sur la question, et faire numéroter sur place toutes les pièces dans ce cas. Généralement, le rappel de l’article 18 de la loi 83-634 suffit, les personnels administratifs étant parfois mal formés, mais soucieux la plupart du temps de bien faire leur travail et donc de respecter la loi. Néanmoins, il peut arriver qu’un refus soit opposé à la demande de numérotation, pour des raisons inexpliquées et probablement inavouables (cela s’est déjà vu !). Il faut alors préalablement - calmement et même aimablement - rappeler au responsable du service qui oppose ce refus que cette numérotation est une obligation, car c’est une protection pour l’agent qui consulte son dossier mais également pour le service, contre toute contestation ultérieure sur la liste des pièces consultées. Si le refus persiste, il convient alors de rappeler – toujours très calmement - à la personne qui oppose ce refus qu’elle ne respecte pas la loi, ce qui est grave pour un agent public et appelle certainement un courrier à ses supérieurs hiérarchiques, voire au recteur ou au préfet, pour signaler ce refus par un agent public d'appliquer la loi. On peut lui faire remarquer (très gentiment toujours) que tout cela pourrait se retrouver joint à son dossier administratif personnel, au minimum, ou lui attirer des ennuis… (cela a suffi dans le cas rencontré pour faire changer d’avis le responsable administratif peu coopératif !).

Comme le dossier doit également comporter la trace de sa consultation par l’intéressé-e, il faut aussi obtenir sur place un bordereau des pièces consultées. Il convient là aussi de rappeler que cela protège toutes les parties. Il s’agit en ce qui concerne l’agent-e de garantir que des pièces qui n'auraient pas été mises dans le dossier pour la consultation n'y soit pas jointes ensuite avec un numéro supérieur à la dernière pièce consultée, ce qu'on ne peut pas non plus prouver si on n'a pas de bordereau établissant clairement ce qu'on a pu consulter… N’acceptez pas la proposition d’un envoi différé d’un bordereau établi a posteriori par l’administration, car vous ne pourriez pas prouver qu’il n’est pas conforme à ce que vous avez pu consulter si tel était le cas. En cas de mauvaise volonté manifeste à établir ce document, vous pouvez confectionner vous-même le bordereau, au fur et à mesure, sur papier libre, en notant les numéros des pièces et leur nature, le signer et le faire également signer et tamponner à la fin de la consultation par quelqu'un de l'administration qui a assisté à la consultation, puis en faire mettre une copie dans le dossier.  Cela paraît évidemment très procédurier, mais dans un cas conflictuel, outre les traces incontestables que cela permet de laisser sur les documents réellement consultés, l'avantage est que l'administration et la direction de l’établissement voient alors que la personne est conseillée par des gens qui connaissent les textes, et se demandent alors si une action juridique est en préparation. Cela peut parfois les motiver à calmer un peu le jeu et à procéder correctement, dans le respect des droits de l’agent-e concerné-e. 

Accès au dossier médical 

Il est également possible de demander l’accès au dossier médical détenu par le service de médecine préventive de l’établissement. Cela est utile, voire indispensable, dans les cas de procédure d’inaptitude au poste pour raisons médicales, surtout en cas de contestation de cette inaptitude par l’intéressé-e. Comme en dispose le code de la santé publique, Article L1111-7, l’agent a, comme toute personne, le droit à la communication de « l'ensemble des informations [...] , qui sont formalisées et ont contribué à l'élaboration et au suivi du diagnostic et du traitement ou d'une action de prévention, ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, notamment des résultats d'examen, comptes rendus de consultation, [...] »

Pour aller plus loin, quelques liens:

https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F31546
https://www.cada.fr/administration/gestion-des-agents-publics

http://circulaires.cdg77.fr/?-La-tenue-du-dossier-individuel-#8.%20Modalit%C3%A9s%20de%20communication%20du%20dossier%20individuel%20aux%20agents
http://infosdroits.fr/le-dossier-administratif-des-agents-de-la-fonction-publique-composition-procedure-de-consultation-gestion-administrative/

https://www.autonome-solidarite.fr/articles/dossier-fonctionnaire/

 

 

Modèles de courriers de demande de consultation

XXXX

adresse

mail

à Monsieur/Madame YYYY

Président / Directeur -Présidente/directrice

de l’établissement X

 

 

Objet : Demande de communication du dossier administratif

 

 

Monsieur le Président/Directeur/-Madame la Présidente/directrice

Conformément à la législation en vigueur, je souhaite avoir communication de mon dossier administratif.

Je vous remercie de bien vouloir faire expédier à mon adresse ci-dessus la copie de tous les éléments de mon dossier administratif, ainsi qu’un bordereau à contresigner par mes soins établissant la liste des pièces fournies. [préciser éventuellement si la demande concerne un envoi papier ou électronique]

 

Vous en remerciant par avance, je vous prie de croire, Monsieur le Directeur, à l'expression de ma respectueuse considération.

 

 

 

XXXX

adresse

mail

à Monsieur/Madame YYYY

médecin de prévention de

l’établissement X

Monsieur/Madame le docteur YYYY

je demande à avoir communication sur place du dossier médical complet me concernant détenu par vos services, comprenant, comme le stipule l'article L1111-7 du code de la Santé publique : « l'ensemble des informations [...] , qui sont formalisées et ont contribué à l'élaboration et au suivi du diagnostic et du traitement ou d'une action de prévention, ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, notamment des résultats d'examen, comptes rendus de consultation, [...] »

 

Vous en remerciant par avance, je vous prie de croire, Monsieur/Madame, à l'expression de ma respectueuse considération.

 

1La référence à cet article n°19 n’a pas été modifiée dans ce décret, mais elle n’est manifestement plus pertinente suite aux modifications importantes de la loi 78-17 opérées en 2018, qui ont changé tous les articles du n°1 au n°72...