Thème 3 - Redonner du sens à nos métiers

Publié le 29 mai 2025

Thème 3 - Redonner du sens à nos métiers

 

Une crise du recrutement commence à se faire jour dans l’enseignement supérieur et la recherche avec une chute du nombre de candidat·es sur les postes mis au concours et un nombre croissant de postes non pourvus, aussi bien chez les enseignant·es que chez les enseignant·es-chercheur·ses (EC). Dans leur ouvrage, Redonner du sens au travail (Le Seuil, 2022), Thomas Coutrot et Coralie Perez identifient trois dimensions qui permettent de reconnaître le sens du travail issues notamment des travaux de Christophe Dejours, théoricien de la psychodynamique du travail (par ex. Travail, usure mentale : essai de psychopathologie du travail (Bayard, 1993):  

  • L’utilité sociale reconnue par les institutions et/ou les citoyens (utilité sociale et reconnaissance) ou  “le sens par rapport à une finalité à atteindre dans le monde objectif” ;
  • L’alignement des valeurs personnelles et des objectifs du travail (réflexivité et cohérence éthique) ou “le sens de ces activités par rapport à des valeurs dans le monde social” ;
  • La possibilité de montée en compétence et en connaissances (apprentissage et capacité de développement) ou “le sens, enfin, par rapport à l’accomplissement de soi dans le monde subjectif”.

Cette grille de lecture peut s'avérer pertinente pour traiter les différentes questions et proposer des mandats pour redonner du sens à nos métiers, questionner nos missions et les moyens de les réaliser. 

 

Repenser la carrière des enseignant.es-chercheur.es et des enseignants affectés dans le supérieur

Les mesures de la loi de programmation de la recherche, notamment celles centrées sur l’attractivité du métier d’enseignant.es-chercheur.es, n’ont rien résolu. En effet, le ministère avait fait le choix de mettre l’accent sur les chaires de professeures junior (CPJ) - qui se sont au final révélées peu attractives - et le ministère propose d’étendre aux MCF les procédures de prétitularisation dans le cadre de l’acte II de l’autonomie.

Ce congrès est l’occasion pour le SNESUP-FSU de revoir ses propositions pour améliorer les carrières des EC, notamment en contextualisant ses différents mandats sur la fluidification des carrières des EC et en les reliant à celui d’un recrutement au plus proche de la thèse alors que l’âge moyen de recrutement est en constante augmentation et atteint actuellement plus de 35 ans en moyenne. 

 

Les EC sont également confrontés à de grandes difficultés lorsqu’il s’agit de changer d’établissement. Le système actuel de mutation prioritaire ne permet pas de répondre aux besoins et nombre de nos collègues doivent choisir entre habiter loin de leur établissement ou loin de leur famille. Le congrès est l’occasion de se pencher sur nos propositions vis-à-vis de la mise en place d’un vrai système de mutation prioritaire pour les EC.

Le manque d’attractivité concerne également les enseignants des premier et second degrés affectés dans le supérieur (E2D), pour lesquels 25 % des postes n’ont pas été pourvus l’année dernière. Comme pour les EC, les corps enseignants de l’éducation nationale peine à recruter, comment attirer les étudiants vers le métier d’enseignant ? Comment expliquer le manque d’attractivité de l’affectation dans le supérieur pour les collègues affectés dans l’enseignement scolaire ? Les causes sont-elles communes ou distinctes de la perte d’attractivité observée chez les EC ? Enfin pour les collègues E2D, titulaires d’une thèse et qualifié·es par le CNU quid des modalités de leur intégration et/ou de leur recrutement dans le corps des MCF ?

 

Améliorer nos conditions d’exercice de nos missions

Tandis que les effectifs étudiants ont explosé depuis la mise en place de la LRU (voir dossier mensuel Juin 2025 en Annexe). Cette diminution des effectifs du personnel enseignant et Biatss a entraîné ces dernières années une explosion du nombre d’heures complémentaires et de vacataires sous-payés, mais également un transfert progressif des tâches administratives vers les E2D et les EC. Quelle influence la diminution de la proportion de titulaires et l’augmentation de la précarité du personnel et du nombre de vacataires ont-elles sur le fonctionnement de nos établissements et sur la définition de nos métiers ? La LRU et plus récemment la LPR ont créé de nombreux contrats non régulés au niveau national, augmentant d’autant plus la précarité de ces enseignant.es et enseignant.es chercheur.es contractuel.les au sein de nos établissements.

 

La multiplication des réunions en visioconférence, des fichiers à remplir et des différentes injonctions venues d’équipes dirigeantes de plus en plus pléthoriques au sein de nos établissements contribue à ce sentiment de perte de sens de nos métiers. Quelles sont les conditions qui permettraient d’enrayer ce sentiment de perte de sens de nos métiers ?

Dans ces conditions d’exercice de notre travail, il nous est difficile de contribuer sereinement aux huit grandes missions prévues dans le code de l'Éducation (Article L123-2). Comment doivent évoluer nos conditions d’exercices afin de pouvoir pleinement assurer nos missions d’enseignement et/ou de recherche ?

 

Le bâti universitaire continue de se dégrader sans que les pouvoirs publics ne se saisissent réellement de ce problème. La seule piste envisagée par le ministère est celle de la dévolution du patrimoine et du recours à l’emprunt. Comment faire face au manque d’investissement dans les infrastructures, dans le bâti universitaire et les équipements ?

 

Lutter contre l’augmentation du localisme

Initié par la loi LRU, puis continué par la LPR, le transfert par le ministère de prérogatives dans les mains du seul chef d’établissement s’accroît considérablement. Comment redonner plus de pouvoir au collectif et notamment au CNU dans les nouvelles procédures ? Ce congrès pourra être l’occasion de réfléchir sur l’état de la démocratie interne et sur la collégialité au sein de nos établissements d’enseignement supérieur, qui font partie des éléments ayant beaucoup pâti de la multiplication de types de statuts d’établissement. Alors que les derniers établissements expérimentaux ont été mis sur pied et que les premiers EPE sont en train de sortir ou sont déjà sortis avec des statuts de Grands Établissements laissant peu de place à la collégialité au sein de leurs conseils centraux, ce congrès est l’occasion de se réinterroger sur le rôle des enseignant·es et des enseignant·es-chercheur·ses dans le fonctionnement des établissements d’enseignement supérieur. La mise en place du COMP 100 %, système au sein duquel chaque établissement devra négocier avec le rectorat sa propre subvention pour charge de service public, va remettre en cause l’équité au niveau national. Quel modèle de répartition des moyens défendre pour permettre au mieux d’exercer sereinement nos missions ? On pourra notamment étudier des éléments liés aux statuts définissant nos métiers et nos établissements ou à la reconnaissance de la spécificité du métier d’enseignant·e-chercheur·se, ou encore la casse des collectifs de travail.

Pour une vraie égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l’ESR

Avec plus d’un an de retard, le ministère a publié le Plan National d’Action pour l’égalité professionnelle 2025-2027, qui comporte quelques avancées notamment sur la santé des femmes. Malgré la demande de la FSU, qui a souhaité prioriser le travail sur les axes 2 et 3, portant sur la mixité des métiers et les écarts de rémunération, le ministère a pris très peu d’engagements. Les réflexions dans le cadre du thème 3 peuvent être l’occasion d'affiner nos propositions pour une vraie égalité professionnelle et de voir sur quel levier d’action s’appuyer lors de la mise en place des PNA locaux.  De plus, bien que les inégalités se résorbent peu à peu, et que le dispositif de repyramidage mis en place en 2021 a permis de corriger légèrement la ségrégation MCF/PU, les femmes enseignantes du supérieur restent toujours plus nombreuses dans les corps et les grades les moins bien rémunérés. Comment lutter contre la ségrégation de corps qui est à toujours à l'œuvre au sein de notre ministère ?