Thème 2 : I Défendre et promouvoir les services publics

Publié le 18 novembre 2009

THEME 2 Le service public et la fonction publique sont une richesse

I Défendre et promouvoir les services publics

I.1. Les services publics, une pièce essentielle d’un autre modèle social

 

a) Les services publics doivent être considérés comme un levier important pour remédier à la crise. Dégagés des contraintes du marché et garants de l’intérêt général ils contribuent à garantir un développement économique soutenable et participent à la fondation d’un nouvel État social, dans une société plus juste, plus solidaire, plus démocratique, redistributive, garante des libertés publiques et sans discrimination.

b) C’est aussi un levier en matière d’emplois et de droits du travail. La masse et la permanence des revenus des agents du service public, de même que les garanties statutaires d’emploi, représentent un « amortisseur social » important en ce qui concerne le pouvoir d’achat global de la population et les droits du travail.

c) La FSU fait sienne la conviction que « Notre époque est celle d’une prise de conscience par les peuples de l’unité de leur destin. Nombre de biens et de services sont appelés à entrer dans le patrimoine commun de l’humanité ce qui appelle une large appropriation sociale et la mise en oeuvre de services publics à tous niveaux : local, national, international, mondial. Le XXIe siècle peut et doit être l’« âge d’or » du service public. En raison de son expérience et de son histoire, la contribution de notre pays pourrait être essentielle dans cet avènement. » De plus en plus de services publics seront nécessaires dans l’avenir au niveau mondial (eau, ressources énergétiques, télécommunications, recherche, éducation et santé…) et c’est dans le cadre de cette hypothèse que nous devons oser placer nos réflexions et nos propositions.

I.1.1. Ils assurent des missions essentielles

a) Les Services Publics sont indispensables à la promotion d’un autre type de développement, centré à la fois sur les besoins sociaux des populations, collectivement définis, et sur le respect des exigences écologiques. Ainsi, des services publics marchands comme l’énergie, l’Eau, les transports nécessitent plus que jamais une gestion publique démocratisée.

b) Du fait de leur caractère public, ils assurent des rôles essentiels de solidarité et de cohésion sociale, de redistribution collective des richesses. Ainsi les services publics de santé, d’éducation et de logement contribuent plus que les transferts monétaires à la réduction des inégalités de niveau de vie. Ils ont vocation à être des outils au service des politiques publiques, aussi bien économiques que sociales et environnementales, afin de favoriser un aménagement équilibré du territoire, répondant aux besoins de la population et permises par la capacité des pouvoirs publics à développer des investissements et des réalisations sur le long terme.

I.1.2. Dans le respect de principes forts Quel que soit le niveau territorial dont ils relèvent, les Services Publics doivent permettre à tous, quels que soient l’âge, le sexe, l’origine et la situation sociale, un égal accès aux services rendus, dans le respect des principes qui sont les leurs : égalité, continuité territoriale, capacité d’évolution dans la qualité du service rendu, solidarité. À ces principes qui fondent l’identité des S.P. il faut ajouter la laïcité, la proximité, la transparence de la gestion et son contrôle par les élu(e)s et les usager(e)s. Ne faut-il pas y adjoindre le respect du principe de précaution ?

I.1.3. Incompatibles avec la mise en concurrence, la rentabilité et le profit Leur objet est la personne elle-même, en particulier dans l’exercice singulier de ses droits sociaux qui ne sauraient donc être soumis à une quelconque notion de mise en concurrence, de rentabilité financière ou de recherche de profits. Contrairement aux professions de foi de la Commission européenne nous observons tous les jours que ces notions inhérentes au Marché sont antagoniques avec la garantie d’une égalité d’accès aux services partout et de leur plein usage, des tarifs abordables par toutes et tous, à fortiori la gratuité.

Les Services publics ne sont pas des marchandises ; il faut résolument inscrire et fixer leur rôle et leur fonctionnement dans une logique de Biens Communs et d’Intérêt Général.

I.2. Les conditions d’un fonctionnement respectueux de ce bien collectif

 

I.2.1. Le rôle de l’État

a) Le marchand est relativement facile à mondialiser alors que le non-marchand est par nature fortement territorialisé. Il n’y a pas de SP, de prestations sociales, sans État, quelle que soit sa forme. Toute redistribution nécessite des impôts, l’acceptation d’une solidarité, donc la conviction, et l’acceptation, d’appartenance à une communauté humaine, culturelle et politique. On a pu le mesurer d’une certaine façon lors du débat sur la constitution européenne. On le voit, en négatif, dans les tentations de repli nationalistes (que ce soit au niveau d’États ou de région).

b) En France de par la spécificité de l’État centralisé, les services publics lui étaient étroitement assimilés dans une dimension nationale. Ce fait fut renforcé à la Libération, par le CNR et la nécessaire reconstruction d’une économie et d’un système social national. Depuis plus de 25 ans, la « réforme de l’État », les privatisations, la décentralisation accompagnée de déconcentration, les baisse d’impôts, la réduction des coûts et la remise en cause des missions de service public sur fond de construction européenne ont modifié profondément l’État et ses missions de service public. Cette politique du « moins d’État », en réalité dans sa dimension sociale et économique, car on assiste dans le même temps à un renforcement de l’État de contrôle social, et même à une recentralisation via les préfets, est désormais ouvertement assumée par une droite décomplexée par l’élection de Sarkosy. Mise en oeuvre de la RGPP, de la RGPO (affaiblissement et injustice fiscale), réforme en cours des Collectivités territoriales... Prenant acte de cette profonde remise en cause du « modèle social » et de l’État régulateur, certains proposent de confier aux régions le rôle actuel de l’État, dans le cadre d’une Europe des régions. Ce qui renforce les questions d’une Europe politique, démocratique, fiscale, sociale et écologique.

c) L’État, quels que soient ses contours et son architecture, doit jouer tout son rôle d’acteur économique, social, culturel et écologique. Par les péréquations et la régulation il se doit de réduire les inégalités territoriales et sociales. Se posent aussi, les questions de garantie d’égalité de service et de « coût » pour les usagers, mais aussi de possibilités d’intervention et de régulation de l’État dans la gestion des ressources en cas de crise (eau par exemple).

d) On le voit ces questions renvoient aussi à des questions territoriales, au sens politique du terme, ce qui ne relève pas toujours de nos mandats. Mais la FSU s’oppose à tout changement de fait de la nature de l’État (fédéralisme) par le biais de l’abandon de prérogatives ou l’assèchement des moyens.

I.2.2. Quelles instances démocratiques ? Quelles instances de régulation ? Les services publics exigent plus que jamais une gestion publique démocratisée. Ils doivent être contrôlés par des instances tripartites : usagers, personnels, élus. Actuellement, à quelques exceptions près (E.N. notamment), la représentativité des usagers n’est pas garantie de manière démocratique (élections par les usagers). Là où ces instances existent, on assiste à des tentatives d’affaiblissement de leurs prérogatives et de recentrage sur le dialogue État/Collectivités territoriales, alors qu’au contraire, évaluer, contrôler, devrait relever d’un débat public tripartite continu. Contrairement à ce qu’on entend parfois, la « décentralisation » à un échelon territorial de proximité n’est pas en soi une garantie de démocratie. Quel que soit l’échelon territorial, une gestion démocratique suppose avant tout l’existence d’instances consultatives qui fonctionnent et une représentativité démocratique dans ces instances, tant des usagers que des personnels.

I.3. Les agents de la Fonction publique

 

a) La FSU défend le principe d’une fonction publique de carrière où le lien qui unit l’agent titulaire à son employeur n’est pas contractuel mais statutaire. Les agents de la Fonction publique sont dans une position légale et réglementaire. Certes, la « puissance publique » se réserve le droit de définir les conditions de recrutement, de déroulement de carrière… mais cela implique aussi, en contrepartie, des droits ou des garanties reconnus aux agents pour les protéger de l’arbitraire.

b) Ce régime juridique différent explique, par exemple, que la pension est un traitement continué et qu’il n’y a pas de différence de nature entre celle-ci et le traitement d’activité. Pour les agents de l’État, l’un et l’autre sont budgétisés.

c) Le choix du statut est le résultat d’une longue maturation historique, consacré à la Libération par l’élaboration du premier statut général républicain, puis au cours de la période 1983-1986 par la mise en place d’une fonction publique à trois versants intégrant les missions de services publics assurées par les collectivités et les établissements hospitaliers.

d) Cette construction statutaire s’appuie sur une conception de la Fonction publique, porteuse de l’intérêt général et participant pleinement au développement économique et humain. Elle traduit donc des principes ou des valeurs. Valeurs du service public : égalité, principe de mutabilité (le service public doit s’adapter en permanence aux besoins de la population), continuité, laïcité… De ce point de vue, les obligations qui incombent aux agents publics sont aussi des droits pour le citoyen. Mais aussi des valeurs garantissant l’État de droit : neutralité et transparence.

e) La distinction du grade et de l’emploi joue un rôle essentiel dans la garantie d’indépendance des fonctionnaires. De même, la possibilité pour tout citoyen d’accéder à la fonction publique, garantie par l’existence d’un concours et d’un jury indépendant, a pour but d’assurer la démocratisation des emplois publics selon une procédure transparente et impartiale. Ce principe trouve son fondement dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen (art. 6).

f) Pour la FSU les garanties accordées aux fonctionnaires créent les conditions de la confiance chez les citoyens dans le fonctionnement régulier des services publics. C’est, pour un agent, ce qui oriente et détermine son action ; c’est aussi pour le citoyen ou l’usager un élément de légitimation et de contrôle de l’action publique.

g) La FSU est donc attachée au modèle d’une fonction publique de carrière qui respecte ces valeurs. Pour les faire vivre, le rôle des instances paritaires consultatives qui découlent de la reconnaissance pour les fonctionnaires du principe de participation, doit être mieux reconnu. Les CTP qui ont pour objet de discuter des questions statutaires et des moyens propres à l’organisation des services doivent conserver un fonctionnement paritaire ; le rôle des CAP doit être renforcé. C’est à leur niveau, dans les actes de gestion qui concernent la carrière des fonctionnaires, que se mettent en oeuvre concrètement les valeurs d’impartialité, d’égalité et de transparence.

I.4. Quels financements ?

 

a) Les finances publiques constituent le levier principal de l’action publique, au service de la réduction de l’injustice sociale, de la réponse aux besoins sociaux et économiques et des investissements de long terme. Leur gestion caractérisée notamment par le faible poids de l’IRPP, est le reflet d’un choix de société.

b) La FSU se positionne clairement en faveur d’une fiscalité qui assure un financement équitable et pérenne des missions de service public passant par un système de prélèvements plus juste, plus efficace, plus égalitaire, plus redistributif.

c) Près de 80 % des ressources publiques proviennent de taxes, d’impôts ou de cotisations payées par les ménages et qui pour l’essentiel ignorent leurs possibilités financières. C’est pourquoi la progressivité de l’impôt sur le revenu doit être renforcée pour faire contribuer plus que proportionnellement les hauts revenus.

d) De plus, la politique fiscale envers les entreprises ne peut se résumer à des abaissements de charges et des exonérations de cotisations diminuant les capacités d’action de l’État. Parce que l’impôt sur les sociétés se conçoit désormais au niveau européen, une harmonisation des taux et des assiettes de l’impôt sur les sociétés doit y être mise en oeuvre pour augmenter leur apport et pour s’opposer au dumping social et aux paradis fiscaux.

e) Avec la RGPP et la RéATE, la réforme des collectivités territoriales poursuit le désengagement de l’État qui renvoie de nombreuses missions vers les collectivités (voire les entreprises avec les PPP) sans pour autant leur donner les moyens de développer de véritables services publics locaux et démocratiques.

f) La FSU défend l’unicité de la tarification pour tous sur tout le territoire. Sans remettre en question ce principe, faudrait-il mettre en débat pour certains services, l’opportunité d’une part de tarification incitative comme le proposait par exemple le grenelle de l’environnement pour l’enlèvement des ordures ménagères (une part fixe, une part liée à la quantité de déchets produits par habitant) ?

g) Face aux reculs de l’État et à la crise économique qui accroît les inégalités existantes entre des territoires et frappe lourdement ceux qui connaissaientdéjà des difficultés économiques, la FSU juge que la mise en oeuvre de véritables péréquations financières est indispensable. Ce qui rend d’autant plus urgent la nécessité de régulations financières pilotées par l’État.

h) La suppression de la taxe professionnelle repose la question du financement des collectivités locales, des services publics de proximité, des emplois publics territoriaux et de l’investissement local. Le niveau le plus pertinent de gestion de chaque service public doit faire l’objet d’un débat de même que la définition par la loi organique de 2004 du seuil plancher d’autonomie financière des collectivités territoriales.

i) Une réforme de la fiscalité locale est indispensable. Pour la FSU, la part des subventions de l’État devrait être sensiblement augmentée, intégrer une part plus conséquente de péréquation et réellement couvrir les missions transférées. Dans la mesure où la fiscalité locale existe, elle pourrait se voit assortie d’un véritable fonds de péréquation horizontale, alimenté sur la base du potentiel fiscal (ce manquement est particulièrement criant entre les départements et entre les régions). Loin de supprimer la taxe professionnelle, il faudrait la réformer en profondeur en encadrant les taux et en exigeant une remise à plat des dégrèvements et exonérations de nombreuses entreprises.