Fiche pratique n° 31 – Refus de titularisation : quel recours et comment faire ?

Publié le 1 mai 2022

Refus de titularisation : quel recours et comment faire ? 

Il arrive que la période de stage d’un·e maître de conférence ne soit pas validée, malgré la sévère sélection qui s’est exercée au moment du concours de recrutement, et que l’établissement procède à un renouvellement du stage ou au licenciement du-de la collègue stagiaire. La période de stage étant justement une période d’essai prévue pour le recrutement de tout fonctionnaire, un refus de titularisation n’est pas totalement anormal mais est heureusement assez rare. Dans les cas où cette décision est contestable, et si elle est contestée, il importe alors de savoir précisément quels sont les textes en vigueur et comment procéder pour faire valoir ses arguments. 

En effet, il arrive que le fondement du refus soit basé sur d’autres considérations que les (in)compétences professionnelles de l’intéressé·e en matière d’enseignement et de recherche. Il est toutefois dans ce genre de cas difficile pour l’établissement d’établir la réalité des insuffisances professionnelles, ce qui donne donc des arguments pour revenir sur une telle décision. Les procédures non respectées peuvent également être des moyens du rapport de force dans une contestation. 

L’article 32 du décret 84-431, définissant le statut des enseignants-chercheurs, donne les règles en la matière : 

« A l'issue du stage[..] les maîtres de conférences stagiaires sont soit titularisés, soit maintenus en qualité de stagiaires pour une période d'un an, soit réintégrés dans leur corps d'origine, soit licenciés s'ils n'ont pas la qualité de fonctionnaire.

[...] les décisions du président ou du directeur de l'établissement sont prononcées conformément à l'avis du conseil académique [...]1, siégeant dans tous les cas en formation restreinte aux enseignants-chercheurs et personnels assimilés. » 

Notons que de surcroît, dans les instituts ou écoles internes à une université au sens de l’article L713-9 du code de l’Éducation (IUT, IAE, école d’ingénieurs,...), « la proposition du président ou du directeur relative à la titularisation doit recueillir l'avis du directeur de cet institut ou école. Cet avis est transmis au président ou au directeur dans un délai de quinze jours suivant sa demande. ». Remarque : rien n’impose que cet avis soit suivi par le président, ou transmis au CAC-r avant sa réunion. Mais si le CAC-r n’a pas eu connaissance d’un avis favorable du directeur de l’institut ou école, c’est un problème qu’il faudra mettre en évidence dans le recours (voir ci-dessous). 

« L'avis défavorable du conseil académique est communiqué dans les huit jours de son adoption au maître de conférences stagiaire [...] qui peut, dans un délai d'un mois à compter de la date à laquelle il en a reçu notification, saisir le conseil d'administration siégeant en formation restreinte aux enseignants-chercheurs d'un rang au moins égal. Le conseil d'administration entend l'intéressé à sa demande. 

L'avis du conseil d'administration ainsi saisi se substitue à celui du conseil académique […] Tout avis défavorable est motivé. [...]»

Il arrive que l’information sur un refus de titularisation soit donnée oralement peu après la réunion du conseil académique (CAC). Cela ne constitue pas une notification officielle et ne fait donc pas courir les délais, mais permet de mettre à profit le temps jusqu’à réception de l’avis écrit (au plus tard 8 jours après) pour commencer à recueillir des éléments utiles pour exercer le recours prévu auprès du CA restreint : par exemple, attestations de collègues avec lesquels on a pu partager des enseignements ou faire de la recherche (y compris d’autres établissements), comptes-rendus de commissions pédagogiques des formations dans lesquelles le-la stagiaire est intervenu·e (pour étayer l’absence de problème d’enseignement grave), etc. 

Une fois la notification écrite reçue, il faut commencer par vérifier que l’avis est bien motivé, c’est à dire qu’il décrit assez précisément les motifs du refus de titularisation. La simple mention d’insuffisances professionnelles ne suffit pas. S’il est motivé et que les motifs avancés sont faux ou très exagérés, il faut alors chercher les moyens de le démontrer. S’il n’est pas motivé, cela donne alors un argument de poids dans le recours auprès du CA restreint : cette motivation imprécise ne permettant pas de savoir où se situe le problème, cela laisse penser qu’il n’y a pas de vraie raison scientifique ou pédagogique à ce refus de titularisation et que les vraies raisons sont inavouables et donc qu’il faut revenir sur la décision du CAC. 

Il est également possible à la personne concernée par le refus de titularisation de demander par écrit (voir modèle ci-dessous) à l’administration communication des documents fournis au conseil académique pour statuer sur son cas (rapports, avis…), une fois la notification de la décision reçue. L’administration n’a pas obligation de les communiquer, car ce sont des documents préparatoires à une décision, donc non obligatoirement communicables, même aux intéressé·es. Mais elle peut le faire, si elle veut être transparente… Il est aussi de droit d’obtenir l’extrait du PV du CAC-r, pour la partie concernant uniquement le cas de l’intéressé·e, anonymée au besoin pour d’autres personnes évoquées dans le même passage. Mais on butte souvent à ce niveau sur la production très tardive, voir l’inexistence de PV de conseils restreints dans les établissements, incompatible avec les délais impartis pour faire le recours. Néanmoins il est important de faire cette demande, par écrit également, ce qui peut permettre de mettre en évidence l’absence d’éléments factuels sur lesquels s’appuie la décision, et de surcroît empêche la production de faux PV produits a posteriori dans un cas de recours en justice ultérieur… cela s’est déjà vu !) 

Un refus écrit de communication de ces documents est une pièce à garder pour s’appuyer dessus, que ce soit dans le recours auprès du CA , ou dans un recours éventuel au tribunal administratif par la suite (une absence de réponse valant refus implicite au bout de deux mois est également un élément d’un dossier juridique, c’est pour cela qu’il faut procéder par écrit pour dater la demande, et dans un cas clairement conflictuel, faire cette demande par lettre recommandée avec accusé de réception). En attendant la réponse éventuelle de l’administration, si la section SNESUP-FSU locale a des élu·es au CAC, il est sûrement possible de se procurer les documents préparatoires (s’il y en a eu...) directement auprès de ces élu·es . Cela permet alors de voir si des arguments erronés (pour ne pas dire mensongers) ont été utilisés dans la discussion en CAC restreint et de prévoir de rétablir les faits devant le CA, ou de fournir des témoignages contredisant les documents fournis au CAC-r. 

Selon le contexte, une demande d’entrevue au président ou directeur de l’établissement, avec accompagnement syndical, peut être envisagée, afin de tenter de donner en amont du recours au CA des éléments d’explication qui ne pourraient pas forcément être exposés complètement devant le CA restreint. La majorité dans un CA étant celle du président ou directeur de l’établissement, l’influence de ce dernier sur sa majorité est un élément à ne pas négliger. 

En tout état de cause, il faut veiller à laisser des traces écrites des démarches, qui ne nuisent pas à l’intéressé·e (avec des formulations les plus neutres et factuelles possibles, et une parfaite politesse, évitant toute interprétation des intentions des uns ou des autres). Avec un peu de chance, il n’y aura pas besoin de s’en servir suite au recours auprès du CA restreint, s’il revient sur la décision du CAC-r. Mais si jamais ce reours-ci échouait et si l’affaire devait arriver ensuite ensuite au tribunal administratif, où la procédure est essentiellement écrite, il faudrait produire des pièces justificatives. 

Il est prudent également dans un cas particulièrement conflictuel de se rapprocher non seulement de la section locale, mais aussi du secteur Situation des personnels du SNESUP-FSU, qui pourra donner des conseils adaptés une fois que les tenants et aboutissants de l’affaire seront décrits.

Modèle de lettre pour demander les documents préparatoires fournis au CAC-r et l’extrait du PV du CAC-r 

Monsieur le Président/Madame la Présidente, 

suite à la réception en date du [DATE DE RECEPTION du courrier] de la notification de votre décision du [DATE figurant sur le document envoyé] concernant [la prolongation de la durée de mon stage/mon licenciement] décidée par le conseil académique restreint/[nom précis de l’organe en tenant lieu], je demande communication de l’extrait du procès-verbal de ce conseil concernant mon cas. Je sollicite également la communication des documents préparatoires me concernant qui ont été fournis aux membres du conseil. 

Vous remerciant par avance de l’attention portée à cette demande, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président/Madame la Présidente, l’expression de mes salutations respectueuses.

1 ou de l'organe compétent pour exercer les attributions mentionnées au IV de l'article L. 712-6-1 du code de l'éducation, pour les établissements où il n’y a pas de conseil académique. Ce sont alors les statuts de l’établissement qui définissent l’organe compétent pour les questions touchant la carrière des enseignants-chercheurs