Référentiel national des tâches : ne pas dévoyer un outil nécessaire
Référentiel national des tâches : ne pas dévoyer un outil nécessaire
Les enseignants du supérieur se voient confier des tâches de plus en plus nombreuses, dont certaines relèvent de leurs missions, d'autres s'en éloignent fortement. Le LMD, la loi LRU, le décret statutaire de 2009 ont eu pour effet d'aggraver ce phénomène et de détériorer nos conditions de travail. Le SNESUP est demandeur depuis longtemps d'un tableau national d'équivalence des tâches, permettant la prise en compte dans le service de l'ensemble des activités des enseignants-chercheurs et enseignants. L'idée est simple : associer à chaque tâche un équivalent mesuré en heure/TD à compter dans le service d'enseignement, dégageant du temps pour la qualité de l'enseignement et de la recherche.
Première distorsion : le tableau ne concerne que les enseignants-chercheurs. Il est urgent que soit procédé à l'extension de ce tableau pour appliquer une égale équivalence des tâches pour tous les collègues, enseignants-chercheurs, enseignants du second degré et enseignants non titulaires.
Deuxième distorsion : le tableau prévu par le décret statutaire n'est pas national. Un tableau différent est adopté par le CA restreint de chaque université. Seul existe un référentiel national publié au JO du 14 août 2009. Le SNESUP a dénoncé le caractère très partiel de la liste d'activités référencées. Notamment de nombreux collègues sont contraints d'exécuter, par glissement de fonction, des activités qui devraient incomber à d'autres corps de fonctionnaires, notamment des BIATOSS : en l'attente des recrutements nécessaires que nous réclamons, ces tâches devraient figurer dans ce tableau, ce qui n'a pas été accepté. Ceci, ajouté à l'absence totale de chiffrage horaire des équivalences, laisse le champ libre à une totale dérégulation dans les établissements.
Pour éviter ce dévoiement, nous avons obtenu la mise en place d'un comité de suivi. Le SNESUP y tient toute sa place et fait prévaloir une véritable prise en compte de la multiplicité des activités. Sur sa demande, ce comité a entrepris la rédaction d'un mode d'emploi. Il doit clarifier la fonction de ce tableau d'équivalence des tâches, mais il ne doit pas être un instrument de la modulation de service, ni faire croître la liste des primes pédagogique ou d'administration. Par ailleurs, d'autre part ce mode d'emploi devait permettre une élaboration des tableaux d'équivalence des tâches dans les établissements sur la base de principes démocratiques.
Sur le point de l'envoyer, aux établissements, le ministère nous a présenté le 24 mars un projet de mode d'emploi qui ne répondait pas aux objectifs visés dans sa version initiale. Outre le rôle minoré des représentants des personnels et du CTP dans le processus d'élaboration, il était de nature à entraîner une grave dérive : les tâches inscrites dans le tableau pouvaient être imposées à un enseignant-chercheur. Ainsi un collègue aurait pu se voir contraint d'assumer des tâches n'entrant pas dans ses missions, par exemple des tâches administratives en lieu et place d'un BIATOSS ; mais également il aurait pu voir entraver ses libertés scientifiques et pédagogiques dans son activité d'enseignant.
Dès réception du projet, le SNESUP a condamné fermement cette dérive. L'ensemble des organisations syndicales s'est opposé à cette disposition, obtenant qu'elle soit retirée du document final. Elles ont également obtenu que le CTP soit associé et consulté sur l'ensemble de la procédure.
Malgré ce recul, l'extrême vigilance des élus des CTP et des CA s'impose pour que le tableau d'équivalence se limite à la prise en compte de l'ensemble des activités dans le service.
Le SNESUP refuse que ce référentiel soit dévoyé pour imposer une norme pour l'ensemble des activités incombant aux enseignants-chercheurs ?ce à quoi tendaient les alinéas retirés du textes sous la pression des syndicats?, pour créer un ensemble d'indicateurs pour de futures évaluations ou encore pour imposer une troisième mission administrative pour les enseignants-chercheurs s'ajoutant à l' enseignement et la recherche ? le document final liste d'ailleurs ces trois « grandes catégories »-.
Le SNESUP demande la suppression des primes et leur intégration au salaire. Il souligne qu'en tout état de cause les primes ne doivent plus désormais jouer le rôle de reconnaissance des tâches exécutées par les enseignants et enseignants-chercheurs, rôle dévolu au tableau d'équivalences. Il rappelle par ailleurs son refus de la modulation de service et son exigence de préserver les libertés académiques.
Ce mode d'emploi, s'il contient une clarification utile des diverses notions (équivalence de tâches, primes, décharges), sera, faute de cadrage national réel, de peu de secours pour obtenir dans chaque établissement un tableau conforme à l'objectif d'améliorer les conditions de travail. Pour ces raisons et à cause des limites d'un tel texte -dont le gouvernement endosse la responsabilité- les militants et les élus du SNESUP mettront toutes leurs forces que l'élaboration locale du référentiel se fasse de manière la plus démocratique et avec pour objectif la réelle prise en compte des activités. Ils interviendront pour que les services de l'ensemble des collègues soient attribués dans la concertation, la clarté, l'équité et sans dérive autoritaire.