Lettre Flash n°23 : Stages, pour des objectifs de formation, un encadrement et un meilleur contrôle

Publié le : 25/02/2014

  

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Stages : pour des objectifs de formation, un encadrement et un meilleur contrôle

De 800 000 en 2006, le nombre des stagiaires est passé à 1,6 million aujourd'hui selon un rapport du CESE1 de septembre 2012. Le stage est devenu un passage obligé pour les jeunes permettant parfois aux entreprises de tester un recrutement potentiel, tout en leur fournissant une main-d'œuvre qualifiée à bas prix, dans le contexte d'un chômage croissant.
Une proposition de loi - votée en première lecture à l'Assemblée Nationale par toute la gauche et à laquelle s'oppose le MEDEF - entend « développer l'encadrement des stages et l'amélioration du statut des stagiaires », conforte le bien fondé des batailles, menées de longue date par le SNESUP-FSU, pour lutter contre l'abus de stages en dehors des cursus de formation et donc sans justification pédagogique, et contre les conditions, parfois indignes, d'accueil d'étudiants dans des entreprises et des organismes publics.
Le stage doit être le lieu d'un retour réflexif sur la formation, dans la perspective des évolutions de carrière que l'étudiant sera appelé à connaître. Il peut permettre à l'étudiant de confronter son idée d'un métier à des pratiques de terrain, d'affiner ses choix, et participe à sa formation professionnelle. Il ne doit pas être dévoyé pour satisfaire des intérêts immédiats du monde socio-économique.
Le SNESUP-FSU rappelle qu'un stage, lorsqu'il est pertinent, doit être un acte de formation pédagogique à part entière. Mais il ne saurait être l'unique solution pour faire acquérir à l'étudiant des compétences et des connaissances nécessaires à sa formation professionnelle et pour lui faire découvrir le monde professionnel.
Le stage doit être préparé, encadré et évalué au regard des objectifs de la formation et inscrit dans la maquette du diplôme. Son évaluation, reposant sur un rapport écrit et une soutenance orale, doit être intégrée aux éléments de validation du cursus. L'accompagnement pédagogique ainsi assuré par les enseignants encadrants doit être reconnu dans un tableau national d'équivalence des tâches.
Le stage ne saurait exister sans une convention signée par l'étudiant, le responsable de la formation et l'entreprise ou l'administration d'accueil, dans laquelle figure clairement l'objectif du stage, en cohérence avec les objectifs de la formation suivie.
L'étudiant doit bénéficier, dans la structure d'accueil, d'un encadrement et d'un suivi par un tuteur. Le nombre de stagiaires encadrés simultanément par un même tuteur du milieu professionnel doit être limité.


«Gratifié» de 436 euros par mois à temps plein, le stage est, de fait, une aubaine pour les entreprises. Le stagiaire est souvent employé en lieu et place d'un salarié. L'abus est flagrant quand les stagiaires se succèdent sur la même mission et parfois même sans tuteur professionnel. Certains étudiants sont tentés d'accepter des stages éloignés des attentes de leur formation pour espérer améliorer leur CV et une hypothétique embauche2. Il existe déjà des dispositions législatives, mais elles ne sont pas appliquées, faute de décrets d'application, de moyens de contrôle dans les entreprises, ou, parfois, d'une vigilance suffisante de la part des universités et des équipes pédagogiques.
La nouvelle proposition de loi affiche la volonté de défendre les stagiaires contre les abus et contient des dispositions en ce sens : limitation du nombre de stagiaires encadrés par un tuteur et par l'entreprise selon ses effectifs, application du code du travail et inscription du stagiaire dans le registre du personnel... En revanche, il ne leur permet toujours pas de bénéficier des droits des conventions collectives (restauration, transports...). En outre, comme pour les réglementations précédentes, son efficacité dépendra à la fois des moyens accordés à l'inspection du travail pour le contrôle de son application3 et des moyens disponibles dans les établissements d'ESR pour assurer le suivi des étudiants. De plus, cette proposition de loi n'aborde pas la problématique dans tous ses aspects. Coordonnée avec les Bureaux d'Aide à l'Insertion Professionnelle (BAIP), une réelle politique de stage, en cohérence avec les objectifs de formation, aurait pu être une des clefs d'entrée dans le monde socio-économique.
Le SNESUP-FSU sera vigilant sur l'amélioration des conditions d'accueil des étudiants en stage et sur la reconnaissance effective des actes pédagogiques associés. Il veillera tout particulièrement à ce que la situation budgétaire dramatique des universités n'incite pas à remplacer des modules de formation par des stages, moins onéreux.
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1. Conseil économique, social et environnemental.
2. Le recours aux petits boulots et aux faux stages est aussi un moyen de financer les études, faute de l'allocation d'autonomie de la jeunesse, qui figurait dans les mesures annoncées par le candidat F. Hollande.
3. F. Hollande a qualifié le contrôle du Crédit Impôt Recherche de « tatillon » pour les entreprises. En serait-il de même du contrôle des conditions de stage ? D'ailleurs, Pierre Gattaz, le président du MEDEF, a déclaré que cette loi va "stresser" les entreprises !