Le chantierdes formations supérieures en 2013

Publié le : 21/01/2013


Le chantier des formations supérieures en 2013

Par Michelle LAUTON, secrétaire nationale

Le CESE a rendu public un rapport sur la démocratisation de l’enseignement supérieur,
qui rejoint nombre des analyses du SNESUP. On ne peut envisager l’avenir de
l’enseignement supérieur en France sans revenir sur quelques questions de formation
abordées ces derniers mois.

Aujourd’hui, l’enseignement supérieur
reste profondément inégalitaire pour les
primo-entrants. La formation continue et la
VAE y demeurent insuffisamment développées.
Les principaux obstacles à la démocratisation
restent les mauvaises conditions de
vie et d’études des étudiants – et notamment
le nombre de salariés – et le financement
insuffisant des universités. La politique
de pseudo excellence du gouvernement Sarkozy
a refusé de considérer comme prioritaire
la réussite du plus grand nombre et la
réponse aux besoins de qualification. 

L’enseignement supérieur doit permettre aux
étudiants d’aller le plus loin possible dans
leurs projets d’études, quelles que soient les
catégories sociales ou les filières de baccalauréat
dont ils sont issus. Pour cela, le SNESUP
se prononce pour une rupture avec les
politiques précédentes : proposer – y compris
aux titulaires de baccalauréats technologiques
et professionnels – une filière correspondant
à leurs choix et à leurs formations
antérieures et donc diversifier les parcours ;
refuser les sélections (entrée en L1 ; entrée en
master et au cours du master) ; rendre lisible
l’offre de formation (licence, master) ; articuler
formation et recherche dès l’entrée en
premier cycle ; mettre en place de nouvelles méthodes pédagogiques (travail en petits
groupes, TER…) ; reconnaître les qualifications
acquises ; rassembler à terme toutes les
formations du post-bac public ; assurer une
répartition équilibrée des formations sur le
territoire ; mettre en place des mesures
d’aides aux étudiants (allocation d’études,
logement, santé). Tout ceci nécessite évidemment
des moyens. Si elles se confirmaient,
certaines propositions entendues
(Assises, ministre, rapport Le Déaut) sont
inquiétantes : créer des licences à « spécialisation
disciplinaire progressive » dont la 1ère
année serait une sorte de super baccalauréat,
donner priorité aux bacheliers technologiques
et professionnels avec mentions en
IUT et STS, sans construire des parcours de
licence leur permettant de réussir… Lors de
la réunion au MESR le 19 décembre, le traitement
de ces questions a été renvoyé au
Comité de suivi licence. Et la formation des
étudiants en santé, qu’il faudra revoir profondément,
continue d’être un immense
gâchis. 

Avec la mise en place des Grandes Universités
regroupant universités fusionnées ou
ex-Idex (et donc établissements publics et
privés, de tutelles diverses), s’appuyant sur
l’exemple des ESPE, le MESR voudrait substituerà la procédure d’habilitation une procédure
d’accréditation, dont il n’a précisé ni
le niveau, ni vraiment les modalités sauf
l’existence d’un cahier des charges détaillé et
un passage au CNESER. Pour justifier cette
nouvelle procédure, le MESR argumente sur
la nécessité d’une politique de site. L’accréditation
permettrait à tous les établissements
partenaires, et donc au privé, de délivrer le
diplôme national de master, ce qui mettrait
en cause sa valeur et qui consacrerait un
abandon du monopole de la collation des
grades et des diplômes. Malgré plusieurs
interventions (dont celle du SNESUP) contestant
cette procédure d’accréditation et demandant
à conserver l’habilitation des formations,
le MESR semble vouloir persister à
mettre le cap sur l’accréditation. Cette idée est
reprise dans le rapport Le Déaut, conjuguée
à une réglementation nationale des diplômes
et à une évaluation périodique. 

Une autre question émerge fortement, tant la
loi sur l’École que dans la préparation de
celle sur l’ESR : développer la place du
numérique. De nouveaux usages, mis en
pratique par nombre de collègues du supérieur,
concernent la mise à disposition de ressources
pédagogiques (mise en ligne de
leurs cours) ou le développement de
séquences d’enseignement à distance. Cela
correspond à des besoins (étudiants empêchés
ou éloignés notamment). On manque
cependant de travaux de recherche sur les
conditions nouvelles d’apprentissage ainsi
créées. Des écueils sont à éviter, l’accès à des
documents papier ou fichiers pouvant amener
l’étudiant déjà surchargé à ne pas venir
aux cours. De même, l’accès immédiat à
Internet modifie le rapport aux savoirs et la
représentation des enseignants qu’ont les
étudiants. Prendre en compte ces nouvelles
conditions est nécessaire. On ne saurait en
déduire que la présence de l’enseignant pendant
des séquences n’est pas indispensable,
car c’est un moment d’échanges et d’ajustements
aux connaissances des étudiants ! Les
« MOOC »(1), dont le rapporteur des Assises
préconise le développement, ne devraient
pas faire office d’outil de la rentabilisation de
l’enseignement supérieur, dans le but de
diminuer les coûts de personnel.  

(1) Massive Open Online Courses