Le changement pour l'Université et la Recherche, mais quel changement ?

Publié le : 27/09/2012


Le changement pour l'Université et la Recherche, mais quel changement ?

par Christophe Pébarthe, secrétaire national

Les quelques signaux encourageants ne compensent nullement les doutes quant à un réel changement de politique.

En 1981, Barbara chantait : « Regarde, quelque chose a changé, l'air semble plus léger, c'est indéfinissable ». En 2012, après les victoires de François Hollande, du parti socialiste et de ses alliés, il est probable que nombre d'universitaires pourraient qualifier les premiers mois du nouveau gouvernement par un tout aussi vibrant « c'est indéfinissable». D'un côté, chacune et chacun peuvent observer des changements tangibles dans l'enseignement primaire et   secondaire.Mille postes sont affectés pour la rentrée 2012, trois cents classes sont rouvertes, la formation réapparaît timidement dans l'emploi du temps
des enseignants stagiaires... Si l'on se tourne vers l'enseignement supérieur et la recherche, conformément aux engagements pris lors de la campagne électorale, l'heure est à la préparation des assises.
Mais, d'un autre côté, les inquiétudes se multiplient. L'organisation se caractérise par une grande opacité quand ce ne sont pas des signes menaçants : poids excessif des exécutifs régionaux, cadrage rigide des débats à venir, questions fermées... Et que dire des « oublis », par exemple les conditions de travail des personnels ? Au-delà de ce qui pourrait apparaître aux yeux de commentateurs bienveillants comme un procès d'intention, il faut bien convenir qu'il est désormais possible de douter du contenu alternatif de la politique que le gouvernement entend mener par rapport à celle de son prédécesseur.
Le 20 août, un entretien que l'économiste Philippe Aghion, ancien zélateur de la politique universitaire entre 2007 et 2012 et désormais conseiller informel
de la ministre socialiste de l'enseignement supérieur et de la recherche, donnait un premier aperçu de l'état d'esprit de la nouvelle équipe. Celui-ci est
confirmé par Geneviève Fioraso elle-même le 31 août dernier. D'abord, et c'est une information de taille, l'autonomie n'est pas remise en cause. Au contraire, si la ministre entend accroître le contrôle sur la pédagogie et l'orientation, elle balaie d'un revers de main l'importance de l'habilitation nationale des diplômes. Rappelons que, dans le rapport Aghion, la création de diplôme par les établissements était un critère mesurant l'autonomie...
Ensuite, et contrairement à son conseiller qui soulignait les faibles moyens alloués à l'Université comme un critère affaiblissant les effets positifs attendus de la loi LRU - à peine critiquet- il le pouvoir excessif des présidents... - la ministre ne craint pas d'affirmer : « On ne peut  pas dire qu'il n'y a pas d'argent dans l'université française. Qu'elles soient en déficit ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'argent. Il y a des niches d'efficience : elles peuvent mieux s'organiser, mutualiser des moyens, faire du redéploiement ». Geneviève Fioraso n'est pas avare de précisions, pour celles et ceux qui douteraient encore : trop de masters, trop de masters avec peu d'étudiants, trop de licences, concentration sur quelques établissements d'enseignements des disciplines rares. Et d'ajouter : « Nous avons quand même les frais d'inscription les moins chers du monde et les boursiers en sont totalement exonérés. Mais je souhaite qu'ils n'augmentent pas de manière significative ».
Alors, l'air semble-t-il plus léger ? Certainement pas quand l'indéfinissable se précise de cette façon. C'est alors une autre chanson qu'on se prend à fredonner en pensant aux Assises, non plus Barbara mais Tonton David : « Moi, je suis sûr, sûr, qu'on nous prend pour des c..."

 

(1) Médiapart
(2) Également dans Médiapart