La protection fonctionnelle
La protection fonctionnelle
par Isabelle de Mecquenem, responsable des "Affaires personnelles" (secteur SDP)
Un droit de tous les personnels des universités encore méconnu, permettant de faire face à divers types d'attaques dans le cadre professionnel grâce à une procédure facile et rapide, dont l'initiative ne requiert pas d'avocat.
Qu'on l'appelle « protection fonctionnelle » ou « protection statutaire » ou encore « protection juridique », toutes ces expressions renvoient à un même droit fixé dans la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 sur les droits et obligations des fonctionnaires, le droit pour tout agent (titulaire ou pas) d'obtenir la protection de la collectivité ou de l'administration dont il dépend, en cas de menaces, voies de fait, injures, diffamations outrages, violences, et cela, même à distance des faits (en cas de mutation ou de départ en retraite par exemple). La seule condition étant que les agressions, non exhaustivement définies tant l'imagination peut être fertile dans ce domaine, aient pour but de nuire à l'agent public en raison de ses fonctions ou de sa qualité de fonctionnaire.
Il est essentiel de comprendre que cette protection est due aux agents publics, et ne représente pas une faveur accordée de façon discrétionnaire. La circulaire B8 n°2158 du 5 mai 2008 confirme ce principe général : « L'administration ne peut refuser cette protection à un agent lorsque les conditions en sont remplies ». Les motifs d'exclusion ne peuvent donc être que rarissimes, tant ce droit est substantiellement lié à l'idée de fonction publique. L'administration a aussi obligation de réparer les éventuels préjudices découlant de ces attaques, ce dont on perçoit l'intérêt dans le cas d'un enseignant-chercheur qui serait diffamé, par exemple.
Cette protection se déclenche aussi en cas de poursuites civiles ou pénales des agents, toujours en lien avec l'accomplissement de leurs missions, à condition que les faits n'aient pas le caractère de faute personnellement imputable, ce que rappelle Marcel Pochard, Conseiller d'État, qui l'évoque sous l'intitulé de « la protection des fonctionnaires » dans Les 100 mots de la Fonction publique (1), publication estimant pourtant tout de ce qui participe d'un « statut juridiquement protégé » comme un archaïque privilège. Une jurisprudence abondante est venue préciser l'application de ce droit et en confirmer l'intérêt dans diverses situations.
Les établissements d'enseignement supérieur sont bien sûr concernés par ce droit et doivent en garantir l'effectivité, comme le prouve le tout récent vade-mecum juridique que la CPU vient de publier, Compétences et responsabilités des présidents d'université (2), qui anticipe le cas d'un président sollicitant pour lui- même le bénéfice de la protection fonctionnelle et indiquant la marche à suivre, à savoir obtenir « la protection de l'université par délibération (hors de sa présence) du conseil d'administration ». Ce cas d'école un peu schizophrénique permet de préciser la voie plus courante dont les personnels peuvent avoir besoin. En effet, la demande de protection doit être notifiée par courrier en recommandé avec accusé de réception adressé au chef d'établissement. Il est indispensable de motiver la demande en relatant les faits de façon synthétique. La circulaire de 2008 recommande à l'autorité responsable de statuer dans les meilleurs délais sous forme de réponse écrite motivant la décision. Notons que la jurisprudence est partagée sur la compétence de cette décision puisqu'elle la reconnaît tant au conseil d'administration (C.E. 7 juin 2004 n° 245562 ; TA Strasbourg 12 janvier 2010 n° 0800607) qu'au président (C.E. 4 avril 2011 n° 334402). En cas d'octroi de la protection, les services compétents de l'université doivent assurer un soutien à l'agent, ainsi qu'un suivi médical, et peuvent, le cas échéant, diligenter une enquête interne. La protection de l'université accordée autorise la prise en charge des frais d'avocat, ce qui lève un obstacle puissant à la défense des personnels confrontés aux plus vives difficultés. La demande de protection fonctionnelle représente une démarche pertinente et adaptée à de nombreuses situations, notamment en cas de présomption de harcèlement moral ou sexuel.
1. PUF, coll. « Que-sais je ? », Paris, 2011
2. Guide juridique consultable sur le site de la CPU
LES ASSURANCES DE PROTECTION JURIDIQUE
Le contrat « Offre Métiers de l'Éducation » est proposé en coassurance par la MAIF et l'USU. Il permet de bénéficier de l'accompagnement des ASL (Autonomes de Solidarité Laïques). Tous les personnels universitaires relevant d'un établissement d'enseignement ou d'éducation public ou privé, laïque et sans but lucratif, peuvent adhérer. Les ASL gèrent la mise en cause de la responsabilité civile par lettre adressée à l'assuré ou à l'assureur, ou par assignation directe devant un tribunal civil ou administratif. Les avocats conseils des ASL peuvent être mis à la disposition des adhérents sollicitant la protection juridique de l'Etat (circulaire interministérielle du 16 août 2006). La convention signée, en juin 2006, avec le MEN reconnaît les ASL comme un partenaire pour la prise en charge des fonctionnaires adhérents, en ce qui concerne l'application de la loi du 13 juillet 1983 relative à la protection des fonctionnaires.
http://www.autonome-solidarite.fr/articles/autre/actualites/ protection-juridique-professionnelle-analyse-des-conflits-traites-en-2010-2011