Jour de carence pour maladie : une mesure injuste qui doit être abrogée

Publié le : 28/04/2012


JOUR DE CARENCE POUR MALADIE

Une mesure injuste qui doit être abrogée

Le SNESUP dénonce fermement l'injustice consistant à sanctionner la maladie sous prétexte d'économies budgétaires.
par Max Lebreton, secteur SDP

Le 24 février 2012, la ministre du Budget publie la circulaire(1) qui fixe les modalités d'application du non-versement de la rémunération au titre du 1er jour de congé de maladie des agents publics titulaires ou non. V. Pécresse fonde son argumentation en invoquant une mesure « d'équité et de justice» dans le but de lutter contre la fraude sociale et le travail dissimulé. Il en résulterait, selon elle, une économie estimée à 120 millions d'euros pour les trois fonctions publiques, somme qu'il convient de comparer aux quelque 20 à 40 milliards d'euros que coûte à la collectivité l'évasion fiscale, ou encore aux 590 milliards d'euros d'avoirs français dissimulés dans les paradis fiscaux, qui représentent un manque à gagner fiscal de 30 milliards d'euros par an pour l'État(2). Quant à l'argument de l'alignement sur le secteur privé, il oublie que dans celui-ci 75 % des salariés sont couverts par une convention collective
prévoyant la prise en charge par l'employeur de tout ou partie du délai de carence. Les causes de l'absentéisme au travail sont diverses et bien connues. On sait qu'il est fréquent lorsque les conditions de travail sont mauvaises, les salaires pas en rapport avec le travail fourni, etc. Dans le secteur public, l'absentéisme frappe surtout les agents en bas des échelles indiciaires. Le SNESUP dénonce fermement l'injustice consistant à sanctionner la maladie sous
prétexte d'économies budgétaires. Mais il existe une autre raison moins avouable : la remise en cause du principe de solidarité collective au profit des assurances à but lucratif ! Cette disposition est également significative du principe de multipénalisation. Pour l'agent, elle se traduit par une ponction immédiate sur le traitement du mois suivant. Certaines primes sont attribuées buées en fonction de la présence au travail. Tel un fusil à deux coups, le premier effet se traduira par une ponction sur le traitement et les primes y afférentes, le second effet portera sur les primes attribuées en cours d'année.
Enfin, la circulaire ignore les principes les plus élémentaires des réglementations en matière de protection des données personnelles professionnelles. Les données précises qu'elle prévoit d'y faire apparaître relatives à l'absentéisme d'un agent constituent une appréciation indirecte sur la manière de
servir de cet agent. Or les bulletins de paye sont demandés à toute occasion, que ce soit pour inscrire son enfant en garderie, pour acheter un véhicule, etc.
Toutes ces raisons font que le SNESUP exige le retrait et l'abrogation de cette mesure. 

(1) Circulaire DGAFP MFPF1205478Cdu 24 février 2012
(2) Enquête au coeur de l'évasion fiscale, Antoine Peillon, Seuil, 2012 

Quelques aspects de ces dispositifs

1er cas : M. X est malade une semaine en juin alors qu'il n'a plus cours. Il dépose un arrêt de maladie et 1/30 de son salaire lui est ôté (jour de carence) alors qu'aucune heure n'est décomptée de son service statutaire déjà entièrement fait.
2e cas : Mme Y est malade une semaine en mai, dans une période où, ayant dépassé son service statutaire, et selon la méthode calendaire, elle effectue quelques heures complémentaires. Or, au motif fallacieux qu'on ne pourrait payer des heures complémentaires non effectuées, la collègue n'aura aucune heure réputée faite mais aura son salaire amputé d'1/30 au titre de la journée de carence.
C'EST LE PRINCIPE DE LA DOUBLE PEINE
Dans ces deux cas, alors que le service annuel a été entièrement fait, non seulement il y a perte de salaire mais de plus, aucune heure n'est décomptée du service ! Or, le SNESUP rappelle que le travail des collègues va bien au-delà des seules heures d'enseignement : préparation, correction, documentation, jurys, réunions diverses, suivi des étudiants et recherche. Ce travail s'effectue tout au long de l'année et nécessite une prise en compte minimale lors d'un congé légal ceci, quelle que soit la position du congé durant l'année (qu'il y ait cours ou non).
C'est pourquoi, lors d'un congé, les heures prévues, quelles qu'elles soient, doivent être réputées faites(1), un « minimum fonction publique » devant être appliqué dans tous les cas. C'est seulement à cette condition que l'injuste jour de carence pourra être « compatible » et applicable dans l'enseignement supérieur.
Le SNESUP a récemment questionné le ministère sur ce point mais, n'ayant pas eu encore de réponse, propose un statu quo dans toutes les universités.  

Gérard Tollet, secteur SDP

(1) Le SNESUP dénonce la politique de réduction de personnel, les économies sous-jacentes et le recours massif aux heures complémentaires qui en
découle, ces heures correspondant au final à un besoin de service. Au lieu de culpabiliser les collègues, nous exigeons que l'administration assume sa mauvaise politique et toutes les heures, y compris celles complémentaires qu'elle demande. Ainsi, l'ineptie calendaire qui consiste en un traitement
différent du congé selon qu'il se positionne avant ou après la 192 ou 384 heure (selon le statut), s'effacera d'elle-même.