Entretien avec Geneviève Fioraso

Publié le : 27/09/2012


ENTRETIEN AVEC Geneviève Fioras

 propos recueillis par Jean Fabbri

La ministre se prête à la discussion dans nos colonnes. Pas de révélations, des aspects ouverts et des interrogations (CTPU et CNESER ?)
et des désaccords aussi. Un élément du débat toutefois.

Jean Fabbri : L'abrogation de la loi LRU et ses logiques, est-elle à l'ordre du jour ?

 

Geneviève Fioraso : Il ne me paraîtrait pas très honnête de faire des annonces avant les Assises - qui ont lieu pour renouer le dialogue, pour écouter les propositions qui seront faites. Après, ce ne sera pas un simple toilettage de la LRU. Peu importe le nom qu'on lui donnera, il y aura une loi sur l'ESR qui ne s'appellera plus LRU. C'est mon souhait à moins qu'il n'y ait un arbitrage différent.

J. F. : Dans le budget 2013, qui se prépare, les niches fiscales du CIR seront-elles remises en cause ? Confirmez-vous la création de 1 000 emplois pour 2013 et quelle en serait la répartition chercheurs, enseignantschercheurs, Biatoss... ? Et sur l'emploi encore, concrétiseriez-vous pour les précaires du supérieur le dispositif Sauvadet ?

 

G. F. : Le CIR a fait l'objet d'annonces par le président de la République. C'est clairement une incitation au développement de la recherche privée et au développement de partenariats entre public et privé. Ce n'est pas une aide directe à la recherche publique, mais plutôt une aide directe à la recherche privée. Il y aura des contrôles renforcés pour éviter les effets d'aubaine de certains groupes pour optimiser le CIR, il y a un focus qui sera mis sur les PMI - et l'encouragement à l'embauche des docteurs.

J. F. : La reconnaissance du doctorat nous semble une priorité pour l'emploi comme pour l'avenir de nos formations...

G. F. : Pour l'insertion des doctorants, nous avons engagé une action qui se révèle complexe pour que le doctorat soit reconnu dans l'administration publique, notamment dans la fonction publique d'État.

J. F. : Oui, revendication du SNESUP depuis très longtemps.

 

G. F. : Je ne le savais pas... Je pense que cela mettrait la transversalité dans les domaines parfois réservés à certains corps. Malheureusement on ne peut pas le faire d'un seul coup, il faut négocier corps par corps. On a engagé ce travail avec M. Sapin et Mme Lebranchu à notre initiative, ça va être un travail plus long que prévu mais je ne lâcherai pas. Côté emplois nouveaux, ils seront ciblés principalement sur la réussite en premier cycle, en ce qui concerne l'enseignement, l'innovation pédagogique, l'orientation, l'ouverture des bibliothèques avec de plus grandes amplitudes horaires.

J. F. : Cela veut-il dire que c'est plutôt des postes en matière d'enseignement de type PRAG que MCF ou PR ?

 

G. F. : La répartition par typologie n'est pas encore déterminée. L'attribution de ces 1 000 postes sera aussi un moyen de réguler les postes entre les universités qui sont notoirement sous dotées et celles qui le sont moins.

J. F. : Avec l'alourdissement de la contractualisation et l'affaiblissement du CNESER, les universités sont engagées dans une logique de concurrence plus que de commune appartenance à un service public fort. Vous changez quoi ?

G. F. : Il y a des priorités très fortes : la réussite en premier cycle, l'insertion des docteurs, la meilleure formation des enseignants quels qu'ils soient, professeur des écoles, comme MCF... Il faut trouver un équilibre entre stratégies de sites et priorités nationales. Notre politique sera au croisement des
deux, ni complètement jacobine ni complètement girondine. Nous voulons éviter de recréer une compétition qui génère des universités à deux vitesses. Sans nier qu'il y ait des pôles universitaires plus forts que d'autres il faut rétablir cette notion de coopérations ; le terme de compétition a été trop galvaudé ces dernières années. Il peut y avoir une émulation.

J. F. : Pour les Assises, dans la composition du comité de pilotage des Assises comme dans les rapporteurs régionaux il n'y a aucun MCF ? Curieux ?

G. F. : Les Assises, ça n'est pas le CNESER, ça n'est pas un lieu de négociations. C'est un débat ouvert avec la nation. Pas de sujet tabou : la place des organismes de recherche par rapport à l'université, le rôle des alliances, sur quelles missions va-t-on recentrer l'ANR, est-ce qu'on continue avec l'AERES...

J. F. : Ça ne devrait pas se faire sans les MCF

G. F. : Non bien sûr... Peut-être y a-t-il eu un loupé sur la représentation des MCF sachant que les PR qui sont là ont été un jour MCF. C'est très difficile de
respecter tous les équilibres.

J. F. : Dans vos déclarations, vos premiers actes, l'abrogation de la circulaire Guéant, la section CNU criminologie sont appréciées. Mais, le mouvement de grève de 2009, son unité sur des revendications à la fois statutaires et concernant la FDE, vous laisse silencieuse ?

G. F. : Nous avons répondu aux demandes sur la FDE, c'est une volonté très forte à la fois de V. Peillon et de moi-même.

J. F. : Mais allez-vous revenir sur le décret statutaire et sur la gestion locale des carrières ?

G. F. : Ça c'est un sujet qui, pour le coup, doit se débattre à la fois au CNESER et au sein des Assises. Je n'ai pas encore pris position là-dessus. Il faut y réfléchir, ça fait partie de l'équilibre que j'évoquais tout à l'heure. C'est un sujet qui nous préoccupe et que l'on traitera. Sur la loi Sauvadet, le dialogue
s'engage avec les organisations syndicales.

J. F. : L'université et la recherche sont de plus en plus pilotées par des organismes non pas élus mais désignés, l'AERES, l'ANR. Quelle est la place de la collégialité universitaire ?

G. F. : Je pense que la collégialité universitaire peut être compatible avec un management, une ouverture à l'international, avec mutualisation de certains moyens car les contraintes budgétaires nous y poussent. C'est aussi l'objectif des Assises, renouer le dialogue pour retrouver la confiance. Il faut en finir
avec la technocratie et retrouver des structures qui soient plus simples. ?