Deuxième étape du plan licence: l’étape du renoncement

Publié le : 05/02/2011
  • par Marc Champesme

Article pour le mensuel du SNESUP (février 2011)

Les objectifs du « plan pour la réussite en licence » tels qu’annoncés par Valérie Pécresse en décembre 2007 étaient pour le moins ambitieux : « diviser par deux le taux d’échec en première année en 5 ans » et « atteindre l’objectif de 50% d’une classe d’âge au niveau licence ». Si ambitieux que la ministre – sans doute consciente de l’obstacle majeur que constituait la perspective des suppressions d’emplois qui était alors encore à l’ordre du jour – n’y croyait pas elle même. En effet, dès 2008, alors que le taux d’échec en première année pour l’année 2007 s’établissait à 55,3%, la « cible » à 5 ans fixée dans le Projet Annuel de Performance 2009 correspondait à une baisse beaucoup plus modeste de 13% du taux d’échec (i.e. valeur cible fixée à 48% pour 2012, au lieu des 27% cohérents avec les déclarations de 2007). Quand à l’objectif de 50% d’une classe d’âge au niveau licence, il a rapidement été ramené au moins ambitieux « 50% de diplômés de l’enseignement supérieur » fixé par la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école de 2005. De plus, fin 2010, sentant approcher rapidement 2012, la ministre a prudemment décidé de reculer la cible d’une année, laissant son successeur tirer le bilan de cet échec à atteindre les objectifs.

L’annonce en décembre 2010 d’une deuxième étape du plan licence sonne donc d’abord comme un renoncement à toute ambition en matière d’amélioration de la réussite des étudiants, d’autant plus qu’elle s’accompagne d’un maintien du dogme de la réduction de l’emploi public qui pourrait bien conduire dans les années à venir à l’annonce de nouvelles suppressions d’emplois dans l’enseignement supérieur. Cette fois-ci, donc, plus question d’afficher des objectifs chiffrés et précis d’amélioration de la réussite en licence. La communication se déplace sur un autre front en inscrivant maintenant en haut de l’affiche la volonté de faire de la licence « un diplôme pour l’emploi ». La thématique de l’orientation étant quelque peu plombée par les très maigres résultats de l’orientation active on en revient donc au thème récurrent de la professionalisation des études. On évite cependant de justifier ce choix : y aurait-il un réel problème d’insertion professionnel pour les étudiants sortant de formation avec leur licence pour plus haut diplôme obtenu ? Des enquêtes récentes du CEREQ [1] sur cette question prouvent le contraire : pour les étudiants sortant de formation avec une licence générale (10% de l’ensemble des sortants de l’enseignement supérieur, à comparer aux 12% sortants sans diplôme après un échec en licence) le taux de chômage est de 7%, chiffre plutôt bon si on le compare aux 6% des sortants titulaires d’une licence pro.

Autre point mis en avant pour cette deuxième étape, l’annonce de l’élaboration de référentiels de formation. Des référentiels de formation dont l’objectif est cependant essentiellement de décliner des compétences à l’intention des entreprises, répondant ainsi aux demandes du patronat de substituer la notion de compétence à celle de qualification, afin d’individualiser encore davantage les conditions d’embauche et d’emploi des salariés. Rien n’est dit du rôle de ces référentiels pour répondre à la nécessité d’harmoniser les contenus de formation et d’améliorer ainsi les possibilités de poursuites d’études en master. Aucun mot non plus dans le dossier de presse du ministère sur la nécessité d’inscrire dans la réglementation un cadrage horaire des formations qui pourrait servir de point d’appui à une évaluation des besoins budgétaires et limiter les risques de dégradation des formations dans le contexte actuel de pénurie budgétaire.

Notes

[1] NEF n°43 (octobre 2009) : « De l’enseignement supérieur à l’emploi : voies rapides et chemins de traverse » et Net.Doc n°69 (septembre 2010) : « Filières professionnelles et générales à l’université: l’impact du parcours sur l’insertion. Éléments d’analyse pour les L3. »