Courrier adressé à Laurent Wauquiez sur la mise sous tutelle des établissements d'enseignement supérieur.

Publié le 18 novembre 2011

 Paris le 18 novembre 2011

Monsieur le Ministre,


Passée parmi les premières à « l'autonomie financière », après avoir été incitée comme les autres à le faire par la
promesse d'un « bonus », l'Université de Limoges, déficitaire pour la deuxième année consécutive, a été mise sous la tutelle du recteur. Dans un communiqué, daté du 17 novembre, qui cherche à minimiser le problème, vous êtes contraint de concéder que « 8 établissements sur 83 constatent cependant deux déficits de fonctionnement consécutifs, ce qui amène les recteurs à arrêter le budget conformément à l'article 56 du décret du 27 juin 2008 ». D'autres établissements suivront immanquablement.

Ce n'est pas la décision conjointe du MESR et de la CPU de créer un « comité des pairs », chargé de détourner
l'attention, ou de bannir du vocabulaire ministériel l'expression de « mise sous tutelle » qui modifiera la situation vécue dans les établissements, ni les prescriptions explicites aux établissements de gel de la masse salariale pour réduire leurs déficits. La communauté universitaire n'a pas à subir les conséquences de choix budgétaires dont vous portez la responsabilité.

Avec un budget de l'enseignement supérieur en berne, contrairement à l'affichage trompeur que le Ministère en fait
depuis plus de 4 ans, les comptes des universités virent, l'un après l'autre, au rouge. Il n'est pas une journée sans qu'un établissement annonce un nouveau plan d'austérité (Pau, Bretagne Sud, Bordeaux 3, Nantes, Poitiers...).

La mise sous la tutelle par les recteurs des universités déficitaires deux années consécutives est une incidence directe de la Loi LRU, comme vous le reconnaissez vous-même par votre initiative visant à faire croire à l'ouverture d'un "dialogue ». Cette mise sous contrôle des budgets, mais aussi des politiques des établissements, détruit la démocratie universitaire. Intervenant à la veille des délibérations budgétaires dans les conseils d'administration, elle constitue un chantage pour qui voudrait dénoncer l'état de pénurie chronique de l'enseignement supérieur.

Nous n'avons pas cessé de le dire : jamais, les libertés des universitaires n'ont été mises sous une surveillance aussi
resserrée. La prétendue liberté offerte par la loi LRU montre son vrai visage. Le SNESUP réaffirme sa demande
d'abrogation de la loi LRU et l'ouverture de négociations pour une tout autre loi.

Alors que la situation est grave pour le service public d'enseignement supérieur et de recherche, vous ne pouvez avoir comme seul interlocuteur la conférence des présidents d'université (CPU) et refuser d'entendre l'ensemble des acteurs du service public d'enseignement et de recherche, aussi bien les syndicats que le CNESER. Une fois de plus, le «dialogue de gestion» entre le ministère et les établissements se fait dans la plus grande opacité. Aucune séance plénière du CNESER traitant de la répartition des moyens aux établissements n'a été convoquée préalablement aux votes des budgets dans les établissements.

Devant cette situation inédite et l'urgence de mesures budgétaires correctives d'ampleur, le SNESUP demande à être entendu et qu'une séance extraordinaire du CNESER soit convoquée dans les plus brefs délais.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de ma haute considération.

Stéphane TASSEL
Secrétaire Général du SNESUP