Rapport Gillet : Programmation de la recherche, statuts… à la veille de l’été, une véritable provocation - Communiqué du 20 juin 2023
Le Rapport commandé par la ministre de l’Enseignement supérieur et la Recherche (ESR) à P. Gillet, ancien directeur de cabinet de Valérie Pécresse, a été publié le jeudi 15 juin. Ce rapport, dont le Snesup-FSU invite chacune et chacun à prendre connaissance, s’inscrit dans la lignée de la lettre de mission dont il développe les implicites.
Il s’agit d’une attaque sans précédent, dont les maîtres mots pourraient être défiance et contrôle. Visant une mise en place en septembre 2023, ce document n’en propose pas moins de redéfinir en totalité l’organisation de la recherche, les rôles des organismes de recherche et des établissements d’ESR ainsi que les statuts des personnels. Le SNESUP-FSU exige que le gouvernement dévoile ses intentions sur l’avenir d’un tel document. En effet ses préconisations ne peuvent se concrétiser qu’en modifiant en profondeur les textes législatifs et réglementaires.
La liberté de recherche est fortement remise en cause : la création d’une fonction de Haut-conseiller à la science (HCS) auprès du Président de la République ou du Premier Ministre et en lien avec le ministère de l’ESR marque une conception inféodée de la recherche en rupture avec la collégialité qui fonde pourtant la réalité de la production scientifique. C’est un pilotage par l’évaluation avec la transformation des organismes nationaux de recherche (ONR) en agences de programme déconnectées des acteurs de la production scientifique. Cette transformation de la politique de recherche via une centralisation et un renforcement du contrôle politique font craindre une perte de diversité de la recherche, dans ses objets, ses méthodes, ses disciplines. Le contrôle serait aussi budgétaire, via les Contrats d’objectifs, de moyens et de performance (COMP) qui coupleraient injonction, évaluation et financement mais aussi des financements “propres” provenant de sources différentes (“agilité locale”, p.63) : appels à projets, fléchage d’une partie du CIR à des collaborations avec des entreprises… qui assujettissent la recherche publique aux intérêts privés et limitent de fait encore la liberté de recherche.
Attaque tous azimuts des statuts : modulation de service pour tout le monde (E, EC, C)
Sous couvert d’attirer les jeunes chercheur·es, le rapport propose d’individualiser les financements de recherche en dotant fortement les néo-recruté·es, mais seulement elles et eux. Il en profite pour dynamiter les statuts, aussi bien ceux des chercheur·es - sommé·es d'enseigner par “solidarité” -, des enseignant·es-chercheur·es - via la modulation de service, notamment pour celles et ceux qui ne font pas de recherche “par choix ou [en raison de] circonstances professionnelles” - et des enseignant·es de statut second degré. Toutes celles et tous ceux qui seraient affecté·es à des laboratoires de recherche devront-ils/elles avoir ou passer une thèse ?
Ce rapport ne cache pas ses intentions brutales à l’encontre de la recherche publique, des statuts des chercheur·es et des enseignant·es-chercheur·es (pp. 70-73). A un moment où se pose la question de la capacité de la communauté à tenir la rentrée universitaire 2023 et compte tenu de la gravité des propositions contenues dans le rapport, ces orientations - dans la lignée de toutes les réformes depuis la LRU - constituent, pour le SNESUP-FSU, une véritable provocation. Si celles-ci venaient à se confirmer, il appellerait à une réaction à la hauteur de l’attaque.