Nouvelles attaques contre les statuts des enseignant·es-chercheur·es : interpellons nos président·es ! - Lettre flash N° 60

Documents joints : 
Publié le : 27/05/2019

 

 

Après le retrait express, à la demande du gouvernement, d'un amendement déposé par des député·es de la majorité (communiqués du 16 et du 21 mai) visant à permettre/élargir le recrutement d'enseignant·es-chercheur·es sans qualification délivrée par le CNU, c'est cette fois le gouvernement qui a déposé un amendement (CL865) à son projet de loi de destruction de la fonction publique pour introduire des mesures spécifiques pour les personnels des établissements d'enseignement supérieur.

Il s'agit, pour l'essentiel, de transformer à l’avenir le comité technique universitaire (CTU), actuelle instance de représentation propre des enseignant·es-chercheur·es (EC) obligatoirement consultée sur les modifications des statuts des EC, en une sous-commission du comité social d'administration (CSA) au niveau ministériel. Ce CSA doit, selon le projet de loi, fusionner les actuels CT et CHSCT, à l'instar de ce que les ordonnances « loi Travail » ont effectué pour les salarié·es du privé. Le CSA serait alors composé en fonction des résultats au vote des élections professionnelles, auxquelles participe l'ensemble des personnels de l'enseignement supérieur, tous statuts confondus. Cela modifierait ainsi profondément les poids relatifs des organisations syndicales au sein du CTU, actuellement très différents de ceux observés au CTMESR, où les organisations arrivant en tête sont celles qui syndiquent le moins les EC, et ont donc le moins d'expertise sur le sujet. Anodine modification d'ordre technique ou premier pas vers une nouvelle tentative d'affaiblissement du statut des EC ?

Cet amendement pourrait en effet paraître anecdotique, si dans la même quinzaine, il n’était pas associé à d’autres sujets relatifs à ce statut des EC : le lendemain du retrait de l'amendement avorté sur la dispense de qualification, la CPU s'est en effet fendue d'un communiqué rappelant ses revendications pour « une approche proactive de l’autonomie »

Derrière la novlangue gestionnaire du titre, la CPU demande très clairement la disparition de la qualification préalable au recrutement des EC et la possibilité de moduler les services d'enseignement « à la tête du client » en fonction des considérations locales. Or, ceci est parfaitement conforme à l'esprit du projet de loi de destruction de la Fonction publique qui, - faut-il le rappeler ? -, vise à donner aux autorités locales tout pouvoir en matière de « management RH ». S'agit-il ici d'une coïncidence fortuite des agendas du gouvernement et de la CPU, ou d’une nouvelle déclaration de guerre en bonne et due forme au statut des EC, 10 ans après la fin du mouvement provoqué par la tentative de mise en place de la modulation des services d'enseignement des EC ?

Les raisons de s'inquiéter existent bel et bien, le gouvernement ayant promis l'ouverture de discussions prochaines sur le recrutement, et donc sur le statut des EC, en échange du retrait de l'amendement sur la suppression de la qualification. Par ailleurs, la loi LRU, que le SNESUP-FSU dénonce depuis son entrée en vigueur et dont il revendique l'abrogation, était largement inspirée à l'époque des propositions de la CPU et a reconnu à celle-ci un rôle spécifique d'interlocuteur de l'État (article L233-2 du code de l'éducation), dont on voit que la CPU entend bien profiter pour faire avancer ses intérêts. Pourtant, si les associations de dirigeant·es d'établissement concernées par les dispositions de cet article sont censées représenter « les intérêts communs des établissements qu'elles regroupent », ces intérêts ne peuvent être définis sans prendre en compte ceux des personnels et des usagers et doivent donc être déterminés par le débat au sein des conseils prévus par le code de l'Éducation. Or, d'après les informations recueillies par le SNESUP-FSU, il ne semble pas que ces revendications de la CPU aient été débattues dans quelque conseil d'université que ce soit. Le SNESUP-FSU ne peut accepter cette nouvelle attaque portée au statut des EC, seul garant de l’indépendance et de l’égalité de traitement sur tout le territoire. Il invite ses adhérent·es et l'ensemble des collègues à interpeller les présidentes et présidents d'universités, pour leur demander des explications et protester contre cette expression non représentative scandaleusement contraire à ce statut et fragilisant plus largement le service public d'enseignement supérieur et de la recherche.