Motion de L’ACD Carrières sociales

Publié le 17 décembre 2019

Motion de L’ACD Carrières sociales

L’Assemblée des Chefs de Départements Carrières sociales (ACD CS) a pris connaissance du projet d’arrêté - daté du 3 octobre 2019 - portant réforme de la Licence Professionnelle dans lequel est décrit la proposition de « Bachelor Universitaire de Technologie », formation en 3 ans portée par les IUT.

 

L’ACD CS s’inquiète des conséquences que pourrait avoir le texte s’il était adopté en l’état, et demande que soient modifiés les points suivants :

Art. 1. « la poursuite d’études en master au sens de l’article L612-6 du code de l’éducation n’est pas de droit ». Cette mention fait référence à une disposition spécifique qui dans le code de l’éducation s’applique au diplôme de licence et non au diplôme de licence professionnelle. Elle apparaît comme une restriction qui n’est pas nécessaire. Il faudrait réaffirmer au contraire la nécessaire double finalité du diplôme : insertion professionnelle et poursuite d’études, chaque étudiant étant libre de son parcours. Dans le cas contraire, l’ACD s’inquiète de la marginalisation que cela signifierait pour ce nouveau diplôme et pour les IUT.

Art. 5. « Chaque étudiant s’engageant dans un parcours de formation conduisant à la licence professionnelle conclut un contrat pédagogique […] établissement ». Les départements Carrières sociales ont une longue pratique du contrat pédagogique. Ils utilisent ce dispositif comme une aide à la réussite de l’étudiant, permettant la personnalisation des parcours. Au demeurant ils s’inquiètent d’une inscription dans cet arrêté d’un dispositif qui deviendrait obligatoire et généralisé, et qui dans cette rédaction deviendrait opposable.

Art. 10. « l’accréditation ne sera accordée que si » : cette formulation trop restrictive ne convient pas. L’ACD propose de la remplacer par « l’accréditation tiendra compte de » ou toute autre rédaction équivalente. Le volume de « 1/3 des ECTS » pour « les mises en situation professionnelles notamment projets tutorés et stages » est trop important, il faut le ramener au moins au 1/4. « L’objectif d’insertion professionnelle des diplômés de licence professionnelle est fixé au minimum à 50% » : les formations ne peuvent garantir que les diplômés vont trouver un emploi immédiatement, cela dépend du marché du travail ; elles n’ont aucun moyen d’action sur la décision prise par les diplômés de poursuivre ou non leurs études. Ce taux peut-être un indicateur mesuré, mais pas une contrainte dans l’accréditation. Cela est valable également pour la mention correspondante art. 14 (avant-dernier alinéa).

Art. 11. « Les parcours de formation sont structurés en blocs de compétences permettant la mise en place d’ensembles cohérents d’unités d’enseignement ». Des ensembles cohérents d’unités d’enseignement existaient précédemment et pas sous forme de « blocs de compétences ». L’ACD CS souligne son attachement à la construction d’unités d’enseignement cohérentes permettant d’acquérir des connaissances et des compétences. Dans le cas particulier des options AS et ES menées de pair avec la certification par les diplômes d’Etat du travail social, l’ACD CS alerte sur le danger d’une non-correspondance de ces blocs et des « domaines de compétences » des DE et donc par incompatiblité le risque d’une mise en danger des formations DEASS, DEES et DETS adossées aux IUTs.

Art. 12. « La délivrance du diplôme est subordonnée à la présentation d’au moins une certification en langue anglaise faisant l’objet d’une évaluation externe et reconnue au niveau international et par le monde socio-économique ». L’ACD CS refuse l’inscription dans cet arrêté du recours obligatoire à des prestataires externes – donc privés – pour des certifications en anglais. Des modules de langues - pas obligatoirement anglaise - doivent en revanche être prévus.

Art. 17. « Le Bachelor Universitaire de Technologie s’appuie sur des programmes nationaux à hauteur de 2/3 du volume horaire global ». Le programme national doit fixer l’ensemble du volume de formation et non les 2/3, tout en autorisant une adaptation locale. « L’accueil d’au moins 50% de bacheliers technologiques en première année d’un IUT et la réussite d’au moins 70% d’entre eux » : de tels objectifs quantitatifs n’ont pas leur place dans un arrêté ; les objectifs d’accueil de bacheliers technologiques ne tiennent pas compte de la diversité des 24 spécialités de DUT et de leurs différentes options. Fixer des objectifs de réussite par décret sur ce quota forcément moins sélectif est irréaliste. Cette inscription d’une obligation de résultats sur la réussite des bacs technologiques est une nouvelle exigence imposée sans que soient accordés des moyens supplémentaires pour atteindre cet objectif. « Le Bachelor Universitaire de Technologie comprend […] 1800 heures d’enseignement pour les spécialités du secteur d’activités "services" ». La présente réforme ne peut être menée avec moins d’heures, donc moins de moyens. L’ACD CS demande à ce que le volume indiqué soit au moins égal à celui de l’offre de formation actuelle DUT + LP, soit 2070h pour le secteur « services ». « Au moins 75% de ces activités de formation seront dirigées et encadrées ». L’ambiguïté de la formulation peut laisser la possibilité aux universités de ne fournir qu’une dotation horaire équivalente à 75% de la maquette. Indiquer en lieu et place « avec un maximum de 25% de CM » serait équivalent et plus clair. « Aux enseignements en présentiel ou selon des modalités équivalentes s’ajoutent au total 600 heures de projets tutorés et entre 22 et 26 semaines de stages » : quels moyens sont alloués pour l’encadrement de ces projets et de ces stages ? Par ailleurs, pour certaines options de la spécialité Carrières Sociales déjà citées, la limitation de la durée des stages à 26 semaines est une autre source d’incompatibilité avec les DE du travail social. L’ACD CS propose une formulation ne faisant mention que du minima de 22 semaines.

L’ACD CS considère que les points ci-dessus mettent en péril le système IUT qui a montré son efficacité depuis 50 ans, et demande que ses remarques soient prises en compte dans une nouvelle version de l’arrêté.

L’arrêté doit garantir que les IUT disposent des moyens nécessaires à la mise en œuvre de l’intégralité du volume horaire de la formation. L’ACD CS souhaiterait aussi que le texte rappelle la responsabilité des universités quant à l’affectation de moyens conformes aux maquettes de diplômes.

L’ACD CS souligne la situation déjà difficile sur le plan des moyens humains dans laquelle sont placés bon nombre de départements CS, en particulier des petits IUT sur des sites délocalisés. Dans ce cadre elle souligne la difficulté à mettre en place un nouveau diplôme à moyens constants alors même que les ressources humaines ne sont pas suffisantes pour assurer correctement les enseignements du diplôme actuel.

En ce qui concerne la temporalité des changements qui sont prévus, l’ACD CS rappelle que l’établissement d’un programme national cohérent est un processus qui demande du temps. Les réformes des Programmes Pédagogiques Nationaux entraînaient des travaux qui duraient 1 an et demi au minimum, alors même que les cadres étaient connus et la durée maintenue. Le passage à trois ans pose des enjeux forts en termes de réflexion sur les progressions. Elle s’inquiète donc des délais envisagés pour leur mise en œuvre.

Enfin l’ACD CS constate qu’elle n’a pas été associée à la réflexion sur cette réforme, et que le processus mis en place, très descendant, tient peu compte des spécificités des différentes spécialités. Elle regrette le manque de concertation et de collégialité en amont de cette réforme dans un contexte où les enjeux sont la consolidation ou la fragilisation d’un système IUT qui a largement fait ses preuves en ce qui concerne l’insertion professionnelle des jeunes, un des objectifs principaux de la réforme.