Le service public de l’ESR au bord de la rupture : se mobiliser dès maintenant ! Appel de la commission administrative du 12 octobre 2023 - Lettre flash n°80

Publié le 12 octobre 2023

 

 

Le mercredi 27 septembre, la loi de programmation des finances publiques a été adoptée sans vote, le gouvernement recourant une fois de plus au 49.3. Le projet de loi de finances, annonçant 16 milliards d’économies, avait été le matin même présenté en conseil des ministres. Avec lui, les grandes lignes budgétaires ont ainsi été précisées pour l’enseignement supérieur et la recherche, confirmant les arbitrages budgétaires défavorables avec un manque de financement d’environ 500 millions € pour couvrir notamment les mesures salariales, par ailleurs largement insuffisantes, décidées par le gouvernement. Dans le même temps, l’enseignement supérieur privé continue à être largement soutenu par les pouvoirs publics.

 

Refuser que l’emploi soit une variable d’ajustement dans les budgets des universités

 

La LRU a organisé  les conditions d'une asphyxie budgétaire  des universités. Avec ce nouveau coup de rabot, la ministre appelle l’ESR à “faire des efforts et à prendre sa part en termes de solidarité”. Faut-il rappeler que cela fait des années que nous faisons des “efforts”, euphémisme pour dire que nous faisons toujours davantage avec moins de moyens au détriment des conditions de travail du personnel de l’ESR, de la formation des citoyens et des forces vives de notre pays ? Nous arrivons aux conséquences limites  du manque chronique de moyens à l’université : de nombreuses universités se trouvent d’ores et déjà dans une situation de déficit aggravée.  Cette situation aura des répercussions délétères sur le développement de notre société et sur les conditions de travail dans l’ESR, qui ne cessent de se détériorer. Les équipes sont épuisées.

 

De toute évidence, la variable d’ajustement sera une nouvelle fois celle de l’emploi statutaire. Ainsi, s’installe l’idée qu’il faudra s’attendre à vivre une campagne d’emploi sur fond de gels de postes. Lors de son entrevue avec le SNESUP-FSU, la ministre a confirmé que sur les 650 ETP annoncés en plus pour l’ESR, l’essentiel des recrutements se feraient sous la forme de chaires de professeur junior (200 CPJ) et de doctorants (sic), et précisé que 110 postes statutaires tout au plus seraient financés, répartis entre les organismes de recherche et les établissements universitaires, charge à eux d’en faire ce qu’ils pourront.

 

Alors qu’il manque de manière plus générale 12000 postes dès maintenant pour l’accueil et la réussite des étudiant·es et pour pouvoir mener  correctement nos activités de recherche, le gouvernement fait une nouvelle fois le choix de maintenir la précarité du personnel et mise sur la multiplication des heures complémentaires, l’appel aux vacataires et le recrutement de contractuel·les pour répondre aux besoins immenses de l’ESR. 

 

Cette situation est d’autant plus préoccupante qu’elle illustre un décrochage sans précédent de l’ESR public, de sa capacité à former au plus haut niveau de qualification un nombre plus important d’étudiant·es et d’assurer un niveau de recherche à la hauteur des enjeux pour le pays. A ce titre, la baisse du nombre de doctorant·es, singulièrement en sciences humaines et sociales, est un indicateur particulièrement préoccupant, de même que la situation de pauvreté qui concerne un nombre toujours plus grand de nos étudiant·es.

 

Formation des enseignant·es : ouvrir la discussion avec les personnels de l’ESR

 

Le ministère de l’Éducation nationale (MEN) a ouvert le 13 septembre un cycle de consultations sur l’attractivité du métier enseignant dont la formation initiale et le recrutement feront partie. C’est dans ce contexte qu’a été confirmé le projet d’une nième réforme de la formation des enseignant·es (FDE) – sans bilan des réformes précédentes qui sont pourtant largement responsables de cette baisse d’attractivité.

 

Certaines « pistes » évoquées sont particulièrement inquiétantes : minoration de la dimension universitaire de la formation pour plus de contrôle de l’employeur, raccourcissement de la durée de formation, renforcement du « terrain », recentrage sur les “fondamentaux”.

 

Les revendications du SNESUP et de la FSU sont claires : dimension universitaire et professionnelle de la formation à bac + 5, financement des études (sans contrepartie de service), stages formateurs et progressifs qui n’utilisent ni les étudiant·es ni les stagiaires comme des moyens d’emploi, non-décrochage PE-PLC, moyens pour les universités et les INSPÉ à la hauteur des besoins.

 

Plus généralement, nous réaffirmons notre attachement à l’existence de plusieurs voies possibles de (pré)recrutement et au concours comme modalité principale de recrutement. Enfin, la formation doit être maintenue dans les universités et en leur sein les INSPÉ, là où les équipes réfléchissent, accompagnent, mènent des recherches sur la FDE – ce qui est aussi une condition nécessaire pour penser un réel continuum de formation, de la L1 à l’après-concours et l’après-master.

 

Au chapitre des concours de recrutement, le SNESUP-FSU condamne  la révocation de la présidente du jury du CAPES de philosophie, mesure autoritaire visant une collègue qui a cherché à défendre la dimension disciplinaire du concours.

Se mobiliser pour l’emploi, les salaires, les pensions et les conditions de travail

 

Demain, l’intersyndicale appelle à se mobiliser contre l'austérité, pour les salaires et l’égalité femmes-hommes. Le SNESUP-FSU appelle à répondre en nombre à cet appel. 

 

Par ailleurs, les neuf organisations de retraité·es dénoncent l’insuffisance de la revalorisation de 5,2 % des pensions annoncée pour le 1er janvier 2024. Elles revendiquent une augmentation immédiate de 10 % des pensions et une négociation pour un véritable rattrapage du pouvoir d’achat, compte tenu de l’inflation qui grève plus lourdement le budget des revenus les plus modestes, comptant parmi eux beaucoup de retraité·es. Elles organisent une journée d’action le 24 octobre et appellent à signer la pétition

 

 

En réaction au conflit israélo-palestinien, la ministre a envoyé un courrier particulièrement choquant aux président·es des établissements. Sans les expliciter, la ministre a notamment évoqué des “transgressions intolérables de notre cadre républicain”. En généralisant des situations isolées, elle jette le doute sur une communauté déjà visée par des accusations d’”islamo-gauchisme”. Le SNESUP-FSU rappelle que l’université est un lieu de recherche, de coopérations internationales et de débat scientifique y compris  sur des sujets liés au conflit israélo-palestinien. 

 

Plutôt que  de sous-entendre que l’antisémitisme ne serait jusque là pas sanctionné dans l’ESR, nous appelons le ministère à garantir les libertés académiques, protéger et soutenir les collègues qui travaillent sur des sujets directement en lien avec la situation. 

 

VOTES : 2 abstentions, 2 CONTRE, 35 POUR

 

Paris, le 12 octobre 2023