Le Mans Université : motion votée à l'unanimité par le CA du 25 janvier 2018

Publié le : 14/02/2018

 

Communiqué de la section SNESUP-FSU de l'université du Mans

 

Conseil d’administration de Le Mans Université

 

Séance du 25 janvier 2018

 

Le Conseil d’administration de Le Mans Université dans la continuité de la motion votée par la CFVU (ci-joint), réaffirme son attachement à un libre accès aux études supérieures, comme à la bonne orientation et à la réussite des étudiant.es. Il est de ce fait très préoccupé par la réforme concernant l'accès à l'université et la réussite étudiante et les modalités de sa mise en œuvre.

Le calendrier précipité de la réforme ne permet pas de mettre en place les dispositifs d’accompagnement des lycéen.nes et des étudiant.e.s qu’appellerait l’ambition partagée d’une meilleure orientation et réussite. Il place les personnels des lycées et des universités dans une situation d’urgence qui leur interdit d’assurer correctement l’information des lycéen.nes et la mise en œuvre du portail Parcoursup. Il ne donne pas le temps aux équipes pédagogiques des universités de proposer les parcours aménagés destinés à favoriser la réussite des étudiant.es dans leur projet de formation. Il ne permet pas la nécessaire concertation au sein des établissements sur les modalités de mise en place de la réforme. Il impose aux établissements de se prononcer sur les capacités, les attendus, les éléments pris en compte dans l’examen des dossiers etc dans des délais qui ne permettent pas de respecter le calendrier des instances et donc de mener une réelle concertation sur les choix pédagogiques en jeu. La mise en œuvre accélérée et improvisée de la réforme oblige les établissements à anticiper des dispositions qui ne sont pas encore votées par le Parlement dans un flou inédit. Cette précipitation se fait finalement au détriment de la qualité du service rendu aux étudiant.es. Elle va à l’encontre des objectifs affichés de la réforme.

Le financement du Plan étudiants et de la prise en charge de l’augmentation du nombre de bachelier.es n’est pas à la hauteur des moyens qu’il nécessite.

Le financement prévu pour la réforme est en effet de 5,7 M€ pour toutes les universités françaises ce qui fait 38 000 € pour Le Mans Université pour la prochaine rentrée. Ce montant dérisoire devrait financer l’étude des dossiers des lycéens candidats (plus de 18000 dossiers pour 2017), assurer le financement du suivi des parcours étudiant, la mise en œuvre du contrat de réussite et l’accompagnement pédagogique des étudiant.es inscrits (3300 en L1 pour 2017),... Cela ne répond en rien aux besoins, alors que les moyens financiers et humains actuels des universités sont déjà insuffisants, le non financement de la réforme va encore aggraver la situation pour une université comme la nôtre déjà sous dotée. Tandis que les financements du PIA mettent en concurrence les établissements et renforcent la concentration des moyens sur quelques-uns d’entre eux, les moyens récurrents ne permettent pas la prise en charge d’une augmentation des effectifs et d’une nécessaire amélioration des conditions d’études en licence dont devrait bénéficier sur l’ensemble du territoire et dans toutes les universités, tou.tes les étudiant.es. Dans ce contexte de manque de moyens, il y a fort à craindre que les universités exsangues soient tentées de recourir au recrutement massif d’enseignants du secondaire, d’enseignants contractuels, ainsi qu’à la modulation des services à la hausse des enseignants chercheurs, dans tous les cas au détriment de la recherche et de son articulation à la formation (moins d’enseignants-chercheurs, c’est aussi à terme la fermeture des masters dans telle ou telle université comme celle d'études doctorales diplômantes).

Les orientations et modalités de la réforme font également peser une forte incertitude sur le devenir du libre accès aux études supérieures. La réforme en cours crée des attentes légitimes auprès des bachelier.es et de leurs familles. Sous prétexte de « davantage de justice » pour les étudiantes et étudiants, et tout en faisant croire à ces derniers et à leur famille qu’ils bénéficieront de parcours « personnalisés », elle instaure une sélection de fait. La mise en place d’attendus spécifiques et de critères de classement des candidat.es peut en effet conduire à interdire l’accès aux études supérieures à certain.es bachelier.es dès lors que les capacités globales des établissements ne correspondraient pas aux flux des nouveaux/elles bachelier.es, additionnés aux redoublant.es et étudiant.es en réorientation. La suppression, pour une partie des bacheliers, du critère de lieu d’habitation pour l’affectation dans un établissement et les stratégies de sélection qu’annoncent déjà certains établissements, risquent de produire des déséquilibres massifs dans la répartition des étudiant.es entre universités et de contribuer à la mise en place d’un système à deux vitesses parmi les universités, déjà engagé par les différents financements des PIA, doublée de l’éviction de nombreux/ses bachelier.es par un processus de surenchère des critères de sélection des dossiers.

Ces tendances ne répondent en rien aux missions d’un service public d’enseignement et de recherche offrant à tou.tes, sur tout le territoire, les mêmes conditions d’études et les mêmes chances de réussite. L’université publique française est fondée sur l’accès de droit à tout titulaire du bac, sur des frais d’inscription contenus et fixés nationalement, sur l’égalité entre établissements et sur le cadrage national des diplômes. Tous ces principes sont remis en cause par le projet de loi et par la mise en place de Parcoursup sans moyens à hauteur des besoins.

Le Conseil d’administration de l’Université du Mans, soucieux de l’accès le plus large à l’enseignement supérieur, de la meilleure orientation et de la réussite des lycéen.nes et étudiant.es considère que les modalités de mise en œuvre de la réforme dans la précipitation sont inadmissibles. Le mode opératoire du ministère sur ce dossier comme sur d’autres est symptomatique d’une situation intenable devenue la règle. La succession à un rythme infernal des demandes, des appels à projets, la sollicitation constante et toujours dans l’urgence des équipes universitaires a atteint un niveau inacceptable. Cela ne permet pas aux personnels de travailler sur le long terme et augmente leurs risques psychosociaux et leur souffrance au travail.

Le Conseil d’administration de l’Université du Mans alerte sa tutelle, le législateur et les citoyens de cette situation qui met en péril l’Enseignement Supérieur et la Recherche publiques de notre pays, la qualité du service rendu aux usager.es et le bon déroulement de la rentrée 2018. Il appelle l’ensemble des universités à ne pas mettre en œuvre la reforme tant que des moyens à hauteur des besoins ne seront pas débloqués pour permettre aux universités d’accueillir et d’accompagner dans de bonnes conditions tous les lycéen.nes et tous les étudiant.e.s.

Motion votée à l’unanimité