La recherche et l’innovation ne peuvent pas être le domaine réservé du chef de l’État - Communiqué de presse du SNESUP-FSU du 7 décembre 2023
Le 7 décembre, le président de la République a annoncé la création d'un « Conseil présidentiel de la Science » et confirmé la nomination de douze chercheuses ou chercheurs, notoirement honoré·es. Missionné pour penser l’avenir à travers les innovations scientifiques et technologiques structurantes, la fonction de ce conseil, avant même qu’il soit officialisé, pouvait être questionnée. Cet organe n'aurait-il pas pour seule fonction de légitimer les décisions surplombantes de l’exécutif ? L’inquiétude est d’autant plus forte qu’il sera exigé une confidentialité des échanges alors que la recherche scientifique est faite de transparence et de débats contradictoires entre pairs d'une même discipline, notamment lorsqu'il s'agit de grands enjeux scientifiques.
L'objectif du président est d’accélérer le plan « France 2030 » afin de faire de la France un pays à la pointe des « technologies innovantes ».. En proposant de « poser les bases de la stratégie de recherche de la France » à l’horizon 2030-2040, voire 2050, l'exécutif impose ses vues et confond recherche et innovation, cette dernière étant qui plus est réduite à la seule innovation de rupture technologique.
Le président annonce aussi des mesures issues des préconisations du rapport Gillet, que le SNESUP-FSU a critiquées dès sa sortie (voir communiqué ici et dossier thématique ici). Elles portent, d’abord, sur la création d’agences de programme qui visent à transformer la politique de recherche par une centralisation du pilotage de la recherche par l'exécutif. Emmanuel Macron dit, par ailleurs, souhaiter développer davantage l’autonomie des universités dans une logique d’accroissement des politiques de site. Or, le modèle qu’il défend est bien celui d’une centralisation et d’un contrôle renforcé ; on voit mal comment les sites universitaires ne seraient pas réduits à des opérateurs territoriaux de recherche, les grands programmes et la nature des appels d'offres les contraignant dans leurs choix scientifiques. Le risque est grand que la recherche fondamentale, dans toute sa diversité, soit ici largement oubliée..
La recherche et l’innovation française n’ont pas besoin d’un énième comité Théodule et encore moins d’une hypercentralisation, mais de moyens financiers nouveaux au moins à hauteur de 3 % du PIB quand pour l’heure la France ne consacre aujourd’hui que 2,2 % de son PIB à la recherche, et encore beaucoup moins à la recherche publique ! Les chercheur·es et enseignant·es-chercheur·es, quant à elles et eux, ont besoin de stabilité, de temps et de sérénité, pour effectuer une recherche libre et de qualité, au service du bien commun et dans tous les domaines.
La recherche est avant tout l'affaire des chercheur·es, enseignant·es-chercheur·es, au sein des équipes de recherche et des structures collégiales, composées de membres élu.es et nommé.es dans des instances académiques. Elle ne peut pas et ne veut pas être le domaine réservé du chef de l'État.
Paris, le 7 décembre 2023