Des mesures ambitieuses et concrètes doivent être prises contre les violences sexistes et sexuelles dans l'ESR- Lettre flash n°41 du 17 novembre 2021

Publié le 16 novembre 2021

 

 

En France, les violences faites aux femmes ont augmenté de façon significative à l'occasion des confinements successifs. Sur nos lieux de travail, les violences sexistes et sexuelles (VSS) sont aussi une réalité : de nouvelles affaires éclatent chaque jour, révélant leur caractère massif et systémique. Selon les chiffres 2020 du ministère chargé de l’égalité, 30 % des femmes ont déjà été harcelées ou agressées sur leur lieu de travail quand 9 % ont subi un viol par quelqu’un de leur milieu professionnel.

Dans les établissements de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR), les révélations de multiples faits de harcèlements sexuels, agressions sexuelles et viols se sont succédées au cours de l’année universitaire 2020-21. Ces violences, constatées dans les universités comme dans les grandes écoles (Instituts d’Études politiques, CentraleSupélec, ENS Lyon,…), touchent les personnels et les étudiant·es. En octobre 2020, l’observatoire étudiant des VSS dans l’ESR révélait qu’une étudiante sur vingt a déjà été victime de viol et une sur dix d’agression sexuelle. Dans la même enquête, 34 % des étudiant·es déclarent avoir été victimes ou témoins de violences sexuelles. Concernant les personnels, les statistiques relatives aux VSS manquent toujours à ce jour. Le SNESUP-FSU rappelle une fois de plus l’impérieuse nécessité de recenser et de centraliser les informations venant des établissements universitaires sur ces sujets. Par ailleurs, « (…) au vu du nombre infime d’affaires traitées, il est clair qu’une forme d’impunité règne toujours à l’université (…) ce qui s’explique par les failles de la procédure disciplinaire. »1 

Plan de lutte 2021-2025 contre les VSS dans l’ESR : la fin du déni ?

Le plan d’action national présenté en octobre et doté d’un budget pluriannuel de 7 millions d’euros, complète les mesures du plan national d’action pour l’égalité professionnelle (2019) qu’il décline en 4 axes :

  • formation et sensibilisation de la communauté universitaire ;

  • renforcement des dispositifs de signalement et de leur fonctionnement (tous les établissements ont l’obligation de créer un dispositif de signalement des actes de violence, de discrimination, de harcèlement et d’agissements sexistes) ;

  • renforcement de la communication sur les dispositifs existants et sur les VSS ;

  • valorisation de l’engagement des étudiant·es et des personnels.

Un cadre national est donc posé (analyse du SNESUP-FSU en cliquant ici), qui acte la réalité des VSS dans l’ESR et la nécessité de les combattre. Mais dans la plupart des établissements c’est l’absence de moyens dédiés pour lutter contre les VSS, -qu’il s’agisse de la formation des agent·es, de la protection et de l’accompagnement des victimes etc.- conjuguée à la frilosité des directions à engager des poursuites disciplinaires, qui saute aux yeux ! Or, le ministère n’envisage l’aide financière à la mise en place de dispositifs « structurés, pérennes et visibles au sein de l’ensemble des établissements » que par le lancement d’appels à projets, ce qui pour le SNESUP-FSU est clairement contradictoire avec l’ambition affichée. De plus aucune évolution significative n’est évoquée en matière de procédure disciplinaire, la victime étant toujours considérée comme « témoin » à l’affaire et le ministère n’effectue à ce stade que des recommandations alors même que la clarification et l’harmonisation des procédures constituent un enjeu fondamental auxquels les établissements ne devrait pouvoir se soustraire.

C’est un plan d’urgence et des mesures concrètes qu’il nous faut pour :

Briser l’omerta, sanctionner les auteurs et mettre fin à l’impunité. Défendre, protéger et accompagner les victimes dont les droits doivent être reconnus et élargis notamment en matière disciplinaire. Former les personnels et la communauté universitaire dans son ensemble pour détecter les situations de VSS, les prévenir et les traiter.

Faire reculer les VSS dans l’ESR implique notamment de faire peser sur tous les établissements une obligation de résultat tout en les dotant de moyens dédiés à la lutte contre les VSS, de leur enjoindre de rendre compte à la communauté (notamment devant des conseils élus) de leur (in)action, de faire évoluer les procédures disciplinaires, toutes mesures que le plan d’action national n’envisage pas.

_______________________________________________

1 Déclaration de Delphine Gassiot-Casalas, présidente de Jurisup, le réseau des affaires juridiques de l’enseignement supérieur. Source :https://www.lemonde.fr/campus/article/2017/12/04/harcelement-sexuel-a-l-universite-une-difficile-levee-de-l-impunite_5224100_4401467.html.