DECLARATION LIMINAIRE du CNESER en commission permanente du 10 octobre 2023

Publié le 10 octobre 2023

Madame la Ministre,

Notre déclaration liminaire abordera aujourd’hui trois points.

Le premier concerne le financement de l’ESR.

Les universités sont en train de voter des budgets rectificatifs pour l’année 2023, et les échos que nous avons sont particulièrement inquiétants. Nos collègues font notamment état de déficits, de ponction dans les fonds de roulement quand ceux-ci le permettent encore au détriment d’investissements prévus, en particulier pour la rénovation des bâtiments, et de gels de postes pour l’an prochain. Dans ce contexte, nous réaffirmons que la non compensation de la totalité des mesures salariales décidées par le gouvernement – qui s’ajoute à des hausses de charges dues à l’inflation, notamment des coûts de l’énergie – n’est pas acceptable. Les fonds de roulement de tous les établissements ne seront pas suffisants pour y faire face et déjà plusieurs d’entre eux mettent en place des mesures d’austérité drastiques (baisse de 20 % des dotations des composantes, gel de 50 % de la campagne d’emploi, incapacité à assumer les indispensables dépenses de maintenance, décalage dans la mise en œuvre des plans pluriannuels d’investissement (PPI), etc.). Rappelons que la LFI 2023 a été celle qui a consacré la plus faible part du budget de l’État à la MIRES depuis plus de 18 ans.

Madame la ministre, vous nous dites que la situation du pays est difficile et que nous devons faire des efforts. Mais Madame la ministre, cela fait plus de 12 ans que nous faisons des « efforts », euphémisme pour dire que nous faisons toujours davantage avec moins de moyens au détriment des conditions de travail du personnel de l’ESR, de la formation des citoyens et des forces vives de notre pays : nous sommes arrivés au bout et les conséquences du manque de moyens chronique de l’université auront des répercussions délétères sur le développement de notre société. C’est d’un plan d’investissement ambitieux dont nous avons besoin. Nous y reviendrons lors de la prochaine séance du CNESER consacrée au vote de la répartition du budget mais c’est maintenant que vous devez obtenir une rallonge budgétaire de 200 M€ pour finir l’année 2023 et une hausse de 4,2 Md€ pour la MIRES en 2024.

Concernant plus particulièrement la recherche, il est devenu criant que la loi de programmation est très insuffisante et ne conduit au mieux qu’à une stagnation des moyens trop faibles consacrés par la nation à l’avancée des connaissances. Nous demandons un signal fort en faveur de la recherche dès le budget 2024 et la revoyure de la LPR au plus vite pour acter une hausse significative de la programmation pluriannuelle.


Notre deuxième point de préoccupation est la formation des enseignants.

Le MEN a ouvert le 13 septembre un cycle de consultations sur l’attractivité du métier dans lequel le supérieur n’a pas été inclus alors que la formation initiale a été annoncée comme thématique de travail. C’est dans ce contexte qu’a été confirmé le projet d’une réforme de la formation des enseignants (FDE) – sans bilan des réformes précédentes.

Nous réaffirmons notre attachement au maintien de la formation dans les universités et en leur sein dans les INSPÉ, c’est-à-dire là où les équipes réfléchissent, accompagnent, mènent des recherches sur la FDE – ce qui constitue aussi une condition nécessaire pour penser un réel continuum de formation, adossé à la recherche, de la première année de licence à l’après concours et l’après master.

La situation actuelle de la FDE est très dégradée, en raison d’une succession de réformes menées ces dernières années, réformes qui n’ont pas été pensées pour la formation et qui ont été menées avec des moyens insuffisants, et cela alors que la formation des enseignants est une condition essentielle de la réussite des élèves. Une réforme à la hauteur des enjeux ne peut se mener sans les acteurs et actrices de la formation ni contre eux. Nous demandons que le MESR pèse pour que le supérieur ait toute sa place dans les concertations actuelles et ouvre en parallèle une concertation multilatérale du supérieur sur la question de la formation des enseignants.

Rappelons ici les revendications principales du SNESUP et de la FSU sur la FDE : dimension universitaire et professionnelle de la formation avec l’obtention d’un master, financement des études sans contrepartie de service (du temps pour étudier, avec engagement à servir une fois la titularisation acquise), stages formateurs et progressifs qui n’utilisent ni les étudiant-es ni les stagiaires comme des moyens d’emploi, non décrochage PE-PLC/PLP/CPE, attribution de moyens pour les universités et les INSPÉ à la hauteur des besoins.

Enfin, et ce sera notre troisième point, nous alertons à nouveau sur la paralysie historique du CNESER disciplinaire puisque, à notre connaissance avant l’annonce faite ce matin par M. Muzenardt de ce qu’un conseiller d’état s’est porté volontaire, le conseiller d’état devant le présider n’a pas encore été nommé : en raison du décret n°2023-856 du 5 septembre 2023, la juridiction se trouve ainsi empêchée de poursuivre le travail engagé dans la mandature précédente et d’instruire les affaires en cours, ce qui est extrêmement préoccupant. Nous demandons que la juridiction puisse assurer sa mission de service public sans attendre. La rupture de la continuité du service public de la justice n’est pas acceptable, nous ne saurions tolérer davantage ce dysfonctionnement.