Contribution de Marc Delepouve (AS) - ESR initier un réseau international

Publié le : 07/06/2019

Initier un réseau international de lutte pour inverser le rapport de force

Au-delà de la déroute de 2009 et de l’illusion de la toute puissance nationale

Marc Delepouve, membre AS du BN

En 2009, la mobilisation dans les universités française a empêché la mise en place de la modulation des services des enseignants-chercheurs. Une attaque frontale contre les collègues a ainsi été bloquée. Dans le même temps, cette mobilisation s’est soldée par un lourd échec. En effet, la modulation des services n’était que l’une des mesures de la loi relative aux Libertés et responsabilités des universités (LRU) et l’application de l’ensemble des autres mesures constitua en France une étape majeure du déploiement du néolibéralisme dans le secteur de l’Enseignement supérieur et la recherche (ESR).

Pour autant, n’allons pas accuser les syndicats de l’ESR et leurs directions nationales de l’époque de la déroute qu’ils subirent. Tout d’abord, les universitaires ne sont pas aux ordres de syndicats. Ensuite, il est des questions qui appellent temps de maturation et prise en compte des multiples dimensions et de leur complexité.

Le néolibéralisme, processus économique et anthropologique global, transforme les sociétés humaines et les individus. Il se déploie à une échelle mondiale d’où,fort de la puissance des marchés et des entreprises transnationales, il exerce une emprise contre laquelle les mobilisations nationales sont d’une efficacité limitée, y compris dans un pays de la taille de la France ; particulièrement dans l’ESR, fer de lance de l’affrontement économique entre les nations. Quant aux sentiments et aux postures de toute puissance nationale, tout au plus ils sèment des illusions qui entretiennent l’impuissance et, de fait, protègent le système. A l’opposé de ce mixte de naïveté et de mégalomanie, ce n’est que par une mobilisation articulée, du local à l’international, en passant par le national et l’Europe, que le rapport de force pourra être inversé. D’où le séminaire international que le SNESUP-FSU organise le 24 juin prochain, veille de son congrès d’orientation. L’objectif estd’initier un réseau international de syndicats de l’ESR, front de luttes communes pour soustraire les universités de la domination sans cesse croissante exercée par les grandes entreprises, les marchés mondiaux et les pouvoirs politiques.

 

Une plate forme commune sera élaborée. Une première ébauche nous est proposée par nos camarades turcs d’Egitim-Sen, en voici un extrait : « (…) l’idée même de l’université, l’un des héritages communs de l’humanité qui devrait constituer le berceau de la liberté de pensée et de la démocratie, est en passe d’être détruite.

Nous ne savons que trop bien qu’il est impossible de parler de libertés académiques dans une université où les universitaires sont inquiets de perdre leur poste ou manquent de sécurité de l’emploi.On ne saurait parler de liberté académique dans une université soumise aux pouvoirs politiques et sous l’influence de l’économie capitalistes. On ne saurait pas davantage parler de liberté universitaire et académique quand les étudiants sont traités comme des consommateurs, a fortiori quand leur lieu d’études est dominé par les relations marchandes et non démocratiques. »

 

Le 24 juin, seront représentés des syndicats de Tunisie, Sénégal, Turquie, Portugal et France. Il s’agira de poser les bases d’une initiative destinée à s’inscrire dans la durée et à s’élargir à d’autres syndicats de l’ESR, d’Afrique et d’Europe, puis de l’ensemble des continents. D’une initiative sans structure bureaucratique lourde. D’une initiative, enfin, porteuse d’actions concrètes vers et avec les organisation et confédérations syndicales, ONG et citoyens mobilisés pour la défense etdéveloppement des connaissances, de la démocratie, de l’environnement... et de l’ensemble des biens communs.

Cette ouverture sur la société et cette stratégie européenne et internationale sont une condition première à une inversion des rapports de force indispensable à la satisfaction de nos revendications pour l’ESR, ses usagers et ses personnels.