Concertation de la Licence - Déclaration du SNESUP-FSU à propos des groupes de travail

Publié le : 19/09/2017

Déclaration du SNESUP-FSU à propos des groupes de travail

Des prérequis à la sélection…

Pour le SNESUP-FSU, le baccalauréat délivre l’accès de droit en Licence car c’est le premier grade de l’enseignement supérieur et la Licence doit rester un diplôme national accessible sans sélection.

Or les prérequis consistent à choisir les étudiant.e.s qui sont en adéquation avec un type de formation, d’apprentissage et d’évaluation. L’acte de choisir, porté par l’institution, permet de trier, éliminer, exclure des étudiant.e.s. C’est une sélection qui ne dit pas son nom.

 

Cadrage politique

Le contrat social sur lequel est basée notre société s’appuie sur les droits humains et, en ce qui concerne le SNESUP-FSU, le droit d’accès à l’éducation.

Le SNESUP-FSU défend avec force le droit d’accès à l’éducation pour toutes et tous. Chacun doit avoir la possibilité d’accéder au diplôme le plus élevé en fonction de ses aspirations et de ses capacités, quelles que soient ses origines sociales et culturelles et quel que soit le type de baccalauréat obtenu. C’est pourquoi le SNESUP-FSU considère que l’enseignement supérieur doit permettre et même favoriser une redistribution sociale : l'étudiant.e travaille en fonction de ses moyens et reçoit un accompagnement en fonction de ses besoins.

 

Qu’est-ce que la réussite étudiante ?

Selon la position que l’on adopte et les intérêts que l’on poursuit, ce qu’on appelle « réussite étudiante » prend des contours bien différents. Pour les derniers gouvernements, réussir se résume à obtenir un diplôme (et en fait de plus en plus des certifications) valorisable/monnayable sur le marché du travail. Pour les intérêts patronaux, réussir ses études, c’est avant tout se rendre employable le plus vite possible, être un produit prêt à l’emploi pour l’entreprise. Pour nous, SNESUP-FSU, faire réussir les étudiant.e.s, c’est leur permettre de construire un chemin les amenant, avec une qualification reconnue par un diplôme, à devenir des citoyen.ne.s émancipé.e.s et des professionnel.le.s autonomes.

Malgré la politique d’austérité qui continue de dégrader les conditions d'accueil des étudiant.e.s et de travail des personnels, l’attachement au service public de ces derniers a permis de maintenir à flot notre système et de ne pas encore pénaliser les étudiant.e.s. Mais nous atteignons les limites de cette politique budgétaire délétère.

Le ministère ne cesse de psalmodier que le niveau d’échec en L1 serait de 60 % afin de démontrer que le système serait à bout de souffle. Or, le SNESUP-FSU rappelle que 81% des étudiant.e.s intégrant l’enseignement supérieur en sortent diplômé.e.s, avec pourtant un investissement par étudiant.e plus faible que la moyenne des pays de l’OCDE.

 

Des parcours virtuellement financés

Le ministère considère que, dans l’enseignement supérieur, le redoublement doit être évité dans le but de permettre, selon un raisonnement purement comptable, une économie de 800 millions d’euros.

En même temps, il prône la mise en place de parcours différenciés avec des temps d’obtention du diplôme de Licence pouvant aller de deux à quatre ans.

L’imposture réside dans le fait que le coût d’un.e étudiant.e en Licence et particulièrement en L1, est inférieur à l’investissement moyen par étudiant.e dans nos universités lui-même très en deçà de l'investissement par étudiant.e dans les autres filières de l'enseignement supérieur. Une analyse plus raisonnable conduit dans le meilleur des cas à une économie de 200 à 300 millions d’euros.

Des parcours diversifiés peuvent être des voies de réussite, mais pour leur mise en place, le ministère propose un marché de dupes aux étudiant.e.s en alléguant qu’ils seraient financés par les économies réalisées en supprimant les redoublements en L1.

Sans moyens supplémentaires, le SNESUP-FSU considère que cette politique va malheureusement conduire à asphyxier et à dévaloriser la Licence.

Lors du lancement de la concertation, voici que Frédérique VIDAL a déclaré : « une réforme ambitieuse ne peut se faire à budget constant » puis elle a annoncé jeudi 14 septembre que « le budget de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation augmentera de 700 millions d’euros en 2018 par rapport au budget initial 2017 », « sans transformation du CIR ». Ce second geste, après le premier qui avait consisté à amputer de 331 millions d'euros le budget de l’ESR, doit être absolument suivi d’un troisième à la hauteur des enjeux réels actuels de la démocratisation pour enfin atteindre un budget de l’ESR à 3% du PIB.

 

Sur la méthode de travail

Face à une problématique qui est complexe et qui doit être considérée de manière globale, le ministère a choisi de fragmenter la réflexion !

Le nombre de groupes nous semble très élevé et dilue la problématique de la réussite avec un risque de redondance ou de manque d’articulation et de cohérence. En premier lieu, la multiplication de groupes de travail avec un rythme hebdomadaire de réunions par groupe sera difficile à gérer en cette période de rentrée, surtout avec une absence de feuille de route et de visibilité sur un projet de texte. En second lieu, le SNESUP-FSU, principale organisation représentative des enseignant.e.s du supérieur, rappelle son attachement aux instances démocratiquement élues et représentatives de la communauté universitaire et désapprouve le contournement du CNESER et du CSLMD ainsi opéré qui dilue la représentativité des acteurs  et actrices de l'enseignement supérieur.

Le SNESUP-FSU demande un verbatim de chaque réunion et, note le peu de parité parmi les rapporteurs des groupes de travaux.

 

Nous demandons un état des lieux chiffré

En cohérence avec la demande du ministère de s’appuyer sur une démarche scientifique, le SNESUP-FSU demande un état des lieux chiffré de l’existant. Le SNESUP-FSU considère que l’on ne peut établir dans la confiance un dialogue constructif si l’on se limite à l’énonciation de convictions non argumentées.

Le SNESUP-FSU sait que les services du ministère ont les moyens de fournir aux groupes de travail les faits chiffrés permettant de nourrir une réflexion constructive.

 

Impératifs et lignes rouges…

Le SNESUP-FSU ne pourra pas accepter un accroissement des missions de l’université sans une augmentation des moyens permettant de les réaliser et une reconnaissance de ces missions.

Nous n’accepterons pas la sélection à l’entrée de l'université quels que soient les oripeaux dont le ministère compte la draper.

Sélectionner, c’est opérer un choix. Qui aurait la responsabilité de ce choix ? L’étudiant.e ou l’institution ?

Exiger des prérequis à l’entrée d’un cursus relève d’une stratégie qui consiste à reporter l’entière responsabilité sur l’étudiant.e, selon qu’il·ou elle aura pu faire la preuve des capacités demandées. Dans ce cas, le choix d’un cursus ne saurait être défini par l’université sans une nécessaire prise en compte du projet et des vœux de l’étudiant.e. Pour l’université, il est plus simple et plus économique de sélectionner l’étudiant.e plutôt que d’élaborer une offre de formation adaptée. Celle-ci doit prendre en compte les différents objectifs et profils des étudiant.e.s, sans tomber dans l’écueil d’une ghettoïsation construite sur les bacs et leurs séries.

Le SNESUP-FSU soutient qu’une concertation plus étroite entre le cycle Lycée, qu'il soit général, technologique ou professionnel, et la L1 doit faire partie des débats de tous les groupes de travail.

Le SNESUP-FSU ne peut pas accepter que le ministère considère les capacités d'accueil comme un fait inéluctable imposé par la pénurie aux équipes pédagogiques et aux étudiant.e.s. C’est le résultat de choix nationaux et locaux que les enseignant.e.s/chercheur.e.s subissent contre leur gré. Des arbitrages budgétaires plus éclairés et une politique prenant en compte une analyse chiffrée des évolutions démographiques auraient permis d’éviter d’avoir des composantes en tension et un tirage au sort des étudiant.e.s.

 

Les occasions manquées de la concertation

Il n’est pas envisagé dans le cadre de cette consultation d’engager une réflexion sur les programmes du lycée et du baccalauréat qui permettrait pourtant une articulation plus fluide entre le Secondaire et le Supérieur.

 

 

L'augmentation annoncée récemment du budget 2018 est très nettement en deçà des besoins réels alors que le nombre d'étudiant.e.s ne fait qu’augmenter depuis des années et que le nombre d’enseignant.e.s-chercheur.e.s et enseignant.e.s titulaires a baissé d'environ 10 % depuis 2007!

 

Ouvrir largement l'accès aux études supérieures et avoir pour objectif une augmentation importante du taux de diplômé.e.s de niveau Licence est un choix politique que doit faire la société et que les lycées et les établissements d’enseignement supérieur publics doivent accompagner.