Face à une injuste austérité, convaincre que d’autres choix sont possibles - Lettre flash n°101 du 10 octobre 2024

Publié le 10 octobre 2024

 À droite toute


Nommé Premier ministre le 5 septembre par le président de la République, trois mois après le scrutin législatif, Michel Barnier incarne un tournant clairement plus à droite tout en multipliant les gages donnés à l’extrême droite. Si le Premier ministre a ouvert la possibilité de rediscuter de quelques points sur les retraites, il évacue toute remise en question du fond de la réforme, notamment la diminution de l’âge légal de départ, et propose même le report de six mois de l’indexation des retraites sur l’inflation. Les grands thèmes les plus rétrogrades sont mis à l’agenda : ordre, remise en cause de l’état de droit, fin des 35h, contrôle et criminalisation de l’immigration, etc. Le discours de politique générale, le 1er octobre, n’a fait aucune place à l’ESR montrant qu’il n’est pas une priorité de ce gouvernement. Son budget est à l’image de cette vision.

 

 Un budget qui propose de saigner la fonction publique


Le Conseil des ministres du 10 octobre devrait avancer sur un projet marqué principalement par la réduction des dépenses publiques. L’annonce de suppression de postes dans la fonction publique n’a pas tardé avec la reprise de la proposition de la Cour des comptes de suppression de 100 000 postes dans la fonction publique territoriale. La santé publique devrait également être touchée avec 5 milliards d’économies annoncés sur la santé : arrêts maladie moins remboursés, hausse des prix des médicaments et des consultations, etc. 


D’ores et déjà le ministre de l’ESR a annoncé devant le CNESER du 8 octobre que “tout le monde doit porter sa part avec équité et justice” faisant fi des coupes franches déjà supportées par notre secteur l’an dernier malgré le déficit chronique de la majorité des universités. 

 

 Le ministre commence par un rappel à l’ordre et une injonction à la neutralité


La nomination de Patrick Hetzel au ministère de l’ESR est un signal particulièrement inquiétant. Chantre de la LRU, DGESIP sous Valérie Pécresse, il a proposé en avril 2024, la création d’une commission d’enquête parlementaire relative à “l’entrisme idéologique et aux dérives islamo-gauchistes [supposées] dans l’enseignement supérieur”, révélant une conception particulièrement réactionnaire de l’université. Cette idée a d’ailleurs été reprise le 8 octobre dans une proposition de résolution déposée par les députés du Rassemblement National.

Plutôt que de considérer les graves difficultés budgétaires des établissements, sa première expression à destination des président·es, directeur/trices et recteur/trices, est une circulaire en réponse à des manifestations étudiantes en soutien aux palestien·nes allant selon lui à l’encontre du principe de neutralité du service public de l’ESR. 

Le SNESUP-FSU rappelle que les universités sont par nature des lieux de débat et que l’indépendance des EC est un principe constitutionnel que nul ne saurait remettre en cause, fût-il ministre. Il a eu l’occasion de le rappeler au ministre lors du dernier CNESER [voir ICI la déclaration liminaire faite par la FSU sur le sujet].

Les trois priorités finalement évoquées par Patrick Hetzel pour l’ESR ne surprennent pas et laissent présager la poursuite de l’inféodation de l’université aux intérêts privés et la dégradation du service public : faire en sorte que “l’offre de formation corresponde aux besoins socio-économiques”(sic) sous couvert d’insertion professionnelle, poursuivre l’acte II de l’autonomie des universités et la simplification, augmenter la contribution du privé au financement de la recherche préfigurant un désengagement massif de l’Etat.

 

 Établissements expérimentaux (EPE) : une nouvelle période porteuse de risques s’ouvre

 
Cette fin d’année devrait marquer le démarrage de la dernière vague des EPE liée à l’ordonnance de 2018 sans qu’aucun bilan n’ait été effectué par le ministère à ce stade. Celui du SNESUP-FSU est sans appel. Partout où les EPE ont été mis en place, les droits des personnels ont reculé et le pouvoir des président·es s’est renforcé, aboutissant à de plus en plus d’abus et d’arbitraire dans les décisions au détriment du sens donné à leur travail par les personnels et de l’égalité de traitement. De la même manière, partout les personnels ont perdu du pouvoir de décision.

À Lyon 1, la mobilisation a permis de repousser le projet d’EPE mais sur d’autres sites, comme à Toulouse, en Bourgogne, à Saint-Étienne, la lame de fond emporte toujours plus la démocratie universitaire. Les sorties d’expérimentation prévues par le ministère le sont exclusivement sous le statut de grand établissement, alors qu’elle n’est pourtant pas la seule solution possible. Le SNESUP-FSU défend une sortie sous la forme d’une université de plein exercice formant du L1 jusqu’au doctorat pour maintenir le lien formation/recherche et refuser l’organisation en grandes universités de recherche et collèges universitaires.

 

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