Transformation des formations supérieures:
Le Ministre est contraint d'accepter le débat
mais reste fermé sur les moyens nécessaires à la démocratisation.

Le ministère a fait parvenir le 17 Juillet 2001 aux universités et aux membres du CNESER un document de réflexion intitulé : " Construction de l'espace européen de l'Enseignement supérieur - document de réflexion - Constat d'étape et suggestions pour l'année universitaire 2001-2002 ". Ce document précise les propositions faites par le ministre devant la CPU du 5 Juillet, que le SNESUP a analysé (cf. déclaration).
Ce même 17 Juillet, le SNESUP (Maurice HERIN, Jean Claude GARRIC, Michelle LAUTON, Bernard ROUX) était reçu par Jean Pierre KOROLITSKI. N'ayant pu prendre connaissance du document qu'en début d'entretien, le SNESUP est principalement intervenu sur deux points : la méthode et les moyens.

Sur la méthode, lors de la rencontre du 17 juillet, le SNESUP a protesté contre le fait qu'il n'a pas été consulté sur le contenu du document, et que divers interlocuteurs avaient laissé entendre la semaine précédente qu'aucun texte n'était prêt. Ce mode de relations pose problème. Pour le SNESUP, il faut une réflexion en profondeur, si l'on souhaite vraiment transformer et démocratiser l'enseignement supérieur - et pour le SNESUP, on ne peut en rester au statu quo. Le SNESUP a demandé que les organisations syndicales soient consultées et que le CNESER débatte du document.

Indiquons ici qu'au CNESER du 23 Juillet, les élus SNESUP ont proposé une motion, votée à l'unanimité après amendements. Cette motion demande une session spéciale du CNESER pour examiner conjointement les voies de transformations des formations dans l'objectif de démocratisation, l'évaluation et l'attribution des moyens nécessaires aux établissements, la prise en compte dans le service des enseignants de l'ensemble de leurs activités.

A propos des moyens, le SNESUP a souligné qu'une réelle réforme, pour être réussie, demande l'affectation des moyens nécessaires, tant en personnels qu'en crédits et matériels. En effet, seul un travail considérable d'ingénierie pédagogique et scientifique peut permettre la mise en œuvre d'une réforme innovant. Le suivi des étudiants doit être introduit de manière systématique, ce qui nécessite un recrutement d'enseignants chercheurs en nombre suffisant. Il faut aussi recruter des personnels IATOSS pour la gestion des inscriptions pédagogiques, du suivi des étudiants, des validations, etc.
Ce n'est pas l'actuel plan pluri-annuel - qu'on nous présente comme la solution maximale - qui permettrait de répondre à tous ces besoins.
Déjà pour 2002, les 100 postes destinés aux IUFM pour répondre au déficit criant en matière de formation des enseignants sont prélevés sur l'insuffisante dotation (1000 emplois enseignants pour 2002) du Plan Pluriannuel…

Nous le disons très nettement la transformation démocratique des formations supérieures implique, en matière d'encadrement, des réponses budgétaires aux besoins nouveaux et le comblement des retards accumulés. Elle implique tout autant, la prise compte des charges et activités nouvelles dans les services des personnels. Sans cet engagement de l'Etat, les mesures d'élargissement du cadre réglementaire conjuguées à l'affaiblissement de l'encadrement pédagogique et administratif, ouvriraient directement la voie aux dérives libérales. Ces dangers sont réels : effacement du cadre national et de la logique de service public, parcours d'initiés pour initiés, ouverture au privé, développement de " centres d'excellence " à côté d'un " service de proximité " limité au pré-licence.

Au cours de l'entretien, le SNESUP a aussi abordé les questions suivantes, pour lesquelles nous souhaitions avoir des précisions :

  • Les conditions d'une véritable expérimentation, sans que les conclusions en soient prédéterminées ! : Celle-ci suppose un suivi réel, des analyses et réflexions ouvertes, avec les enseignants, les étudiants, leurs représentants dans les conseils, comme au CNESER..

  • la séparation entre " cursus pré-licence " et " cursus post-licence " : Alors que les cursus étudiants réels se construisent par étape - notamment pour les plus défavorisés socialement - , pourquoi réduire voire effacer l'étape bac + 2 et bac + 4 ?, avec pour conséquence le risque de fin d'études au niveau bac + 3 pour le plus grand nombre.

  • la signification de la création d'un diplôme de mastaire : Si c'est tout autre chose qu'un "grade", alors le risque est réel que ce diplôme bac + 5 très hétérogène repose sur la seule notoriété des établissements (comme l'actuel titre d'ingénieur) ce qui ne manquerait pas de développer des relations de concurrence entre établissements, y compris dans le service public.

  • la réorganisation des filières dites " technologiques et professionnelles " : elle risque de retarder pour certaines d'entre elles (MST, MSG et IUP) les éléments de professionnalisation au niveau post-licence

  • l'articulation entre le dispositif national et les décisions locales pour le nouveau découpage en parcours-types et la dénomination des licences : là encore, il y a risque d'autonomisation, par établissement de formations et de diplômes qui n'auraient plus alors aucun caractère national. La réponse de la DES est que les formations, avec les parcours-types, seraient habilitées ensemble, et garderaient ainsi leur caractère national. Ce ne sont donc plus les parcours individualisés et validés par crédits ECTS, proposés en janvier par le Ministère. Les critiques du SNESUP ont porté, sans qu'à ce jour toutefois de réelles garanties soient apportées par le Ministère en la matière.

Il s'agit donc de questions de première importance, avec des enjeux majeurs et tout autant des risques considérables. Dans ce débat serré avec le Ministre, le SNESUP en appelle aux syndiqués et à l'ensemble des collègues pour qu'ils fassent part de leurs réactions, de leurs exigences et propositions à l'adresse formations@snesup.fr. C'est essentiel avant la rencontre prévue pour fin août entre le Ministre et le SNESUP.