Intervention du secrétaire général du SNESUP lors du CNESER du 18 février 2013 consacré à l'examen de la loi ESR

Publié le : 20/02/2013


CNESER DES 18 ET 19 FÉVRIER 2013

EXAMEN PROJET DE LOI ESR

INTERVENTION DE STÉPHANE TASSEL, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU SNESUP-FSU

C'est une expression que je ferai à deux voix. J'essaierai d'être le plus bref possible et je laisserai la parole à Patrick Monfort pour clore mon intervention compte tenu du lien entre l'enseignement supérieur et la recherche.

Cela ne vous étonnera pas, Madame la Ministre, que je ne partage pas l'œcuménisme ambiant. Vous parlez de passion, je parlerai de raison et l'intérêt général peut avoir des options différentes et des alternatives dans la façon d'avancer pour le service public d'enseignement supérieur et de recherche.
Madame la Ministre, où sont les réponses attendues par la communauté universitaire et scientifique ?
Le texte de loi qui nous est proposé intervient dans les marges et si on se borne à la dimension budgétaire, dans des marges plus qu'exiguës.
Où est la rupture avec la loi libertés et responsabilités des universités, avec la loi pacte pour la recherche. La question du débat que nous souhaitons imposer aujourd'hui articule deux choses : à la fois l'urgence de mesures immédiates que nous attendons toujours, mais aussi le temps long d'une réflexion qui ne conduise ni au statu quo ou ni à un retour ante.

Nos propositions s'articulent sur des éléments de rupture pour une tout autre loi pour l'enseignement supérieur et la recherche.

Le texte que vous nous présentez est un texte d'orientation, vous l'avez dit, un texte qui n'est pas de programmation, mais, plus lourd de conséquences, un texte qui n'est pas non plus d'application. Et, dans ce contexte-là, nombre de décisions sont remises à la sphère réglementaire sans qu'à aucun moment nous ayons eu des engagements clairs sur un certain nombre de points.
Je reviens sur la question de la méthode qui a abouti à un texte que nous considérons comme inabouti, inacceptable. L'intersyndicale, un certain nombre de syndicats ont appelé à un rassemblement aujourd'hui à Paris 7. Je pense que vous n'êtes pas sans savoir que l'amphi a dû être changé compte tenu de l'affluence dans les locaux de l'université Paris 7 pour dénoncer le projet qui est proposé aujourd'hui.
Je voudrais revenir sur la question de la méthode. L'urgence, l'urgence d'un calendrier qui allie à la fois des auditions qui ont été pour le moins courtes, des assises territoriales globalement boudées sur trois sujets, certes d'importance : la démocratisation de l'enseignement supérieur -cette relance de la démocratisation est une urgence ; sur la question de l'organisation de la recherche ; un mille feuilles dans lequel on remplace des procédures pour lesquelles leur faisabilité se pose -l'AERES est effectivement retirée du texte, mais quelles garanties sur l'instance qui lui succédera ? Des assises nationales où la représentation des organisations majoritaires, les premières organisations étaient très largement minorées.
Je voudrais dire dans des termes qui sont certes rapides, mais : tout ça pour ça ? Tout ça pour ça !

Trois points qui nous paraissent essentiels dans les réflexions qui devraient avoir lieu à partir de maintenant et pour lesquelles le SNESUP est présent au CNESER pour imposer le débat et pour se servir du CNESER pour ce qu'il est : une instance nationale élue de régulation pour l'enseignement supérieur et la recherche.

La question des moyens : les moyens ne font pas tout, mais sans moyens on ne fait pas grand-chose et dans ce contexte-là, à la fois que ce soient les établissements d'enseignement supérieur, les universités, les organismes ont besoin de ressources suffisantes, de créations d'emplois en nombre pour pouvoir assumer leurs missions d'enseignement, de recherche. Et, dans ce contexte-là, la question de la répartition, la question des régulations nationales (emplois, carrières, formation diplômes...), de la rupture par les régulations est un élément important qui doit être traité. Nous avons des amendements que nous proposerons pour l'ensemble du texte de loi.
Avançons sur la question des personnels, de la régulation nationale des carrières, sur la question des cadrages nationaux des formations. Aujourd'hui, l'enseignement supérieur, la recherche, le service public ont besoin d'égalité, d'égalité sur le territoire, et c'est bien là le rôle des cadrages nationaux qui doivent trouver leur place dans un texte législatif et non pas seulement dans les questions réglementaires.
Enfin, la question de la démocratisation et du rôle des qualifications. Le texte qui est proposé est peu ambitieux en termes de démocratisation de l'enseignement supérieur. Les relations entre l'enseignement supérieur et le lycée, renvoyées à des conventions à la fois souples et généralisables. Il y a des éléments sur lesquels il faut avancer pour penser les coopérations, penser l'articulation entre le lycée et l'université.
La reconnaissance des qualifications : nous sommes dans une période de hausse du chômage, de crise économique, sociale, environnementale. La reconnaissance collective des qualifications, de l'ensemble des diplômes délivrés par l'université, les DUT, les licences professionnelles, les licences générales, les masters à dimension professionnelle, à dimension recherche, mais aussi de la thèse et de la reconnaissance de la thèse pas seulement dans la haute fonction publique mais dans l'ensemble de la fonction publique, avec son corollaire, la revalorisation salariale, la revalorisation des carrières dans l'enseignement supérieur et la recherche. Je ne vous ferai pas l'affront de vous rappeler le salaire que touche un enseignant-chercheur après de longues années d'études.

Enfin, je vais terminer sur le texte qui nous est proposé. Vous aurez bien compris qu'on est loin de chercher à rendre perfectible ce texte. Nous allons entrer dans une logique d'amendements. Mais, aujourd'hui, la question de réelles négociations avec les organisations syndicales représentatives se pose. Vous avez communiqué un certain nombre d'éléments le 19 décembre dernier, avec derrière la mise sous embargo jusqu'au mois de janvier des documents qui ont été présentés. Le texte de loi qui a été présenté le 15 janvier dernier a été amendé à de multiples reprises et transmis le 8 février sans exposé des motifs. Ce n'est que le 13 février que nous avons eu l'exposé des motifs article par article. Vous conviendrez que les délais qui nous sont imposés sont plus que court pour un texte qui se veut d'ampleur.

Enfin, sur votre lettre envoyée aux élus du CNESER : L'appréciation du projet texte de loi que j'en ai faite, vous la connaissez, je ne vais pas me répéter.

Cependant, Il est des éléments, la confusion entre le public et le privé que je vois clarifiée dans vos propos, mais qui nécessite des clarifications législatives. Il y a d'autres points sur la régionalisation. Je vous entends, mais à chaque fois ce sont des engagements dans la loi qu'il faut, sur le cadrage des formations... Et, à un moment, la parole doit se transformer en actes.

Je terminerai en disant que je ne souhaite pas que nous reproduisions ce qui s'est passé pour la loi sur l'école, c'est-à-dire, une série d'amendements, tous votés, avec un bilan politique arrivant à la fin du CNESER pour nous proposer au vote un texte intégrant tous les amendements y compris ceux pour lesquels on savait qu'il n'y aurait aucune traduction législative. Il est clair que c'est des bilans politiques au fur et à mesure de l'avancée du CNESER que nous souhaitons pour pourvoir intervenir et savoir sur quel pied danser. Je le dis fermement : je n ‘accepterai pas que nous nous retrouvions dans la même situation.